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une vie de tto
18 septembre 2023

La seule au monde

La seule au monde

Finalement, Muriel Robin est une sacrée performeuse. Au moyen d'une question à peine téléguidée par Christophe Dechavanne [que l'on a connu plus discret], elle a offert à l'émission "Quelle époque !" le buzz qui lui manquait pour la rentrée.

Résumons l'affaire ... 
Muriel Robin n'a pas eu la carrière génialissime qu'elle aurait dû avoir au cinéma tout cela parce que les gens sont des cons à ne pas lui proposer des rôles à la hauteur de son indéniable talent au seul motif qu'elle est homosexuelle. C'est d'autant plus certain qu'elle est la seule au monde à avoir confié qu'elle est homosexuelle, ce que les planqués du cinéma ne font pas par crainte de se voir privés de rôles valorisant pour leur carrière. Ce condensé te permet de t'épargner les relances crétines de Léa Salamé, plus cagole que jamais, s'exclamant "Ah non mais c'est vrai ?", "C'est très profond ce que vous dites Muriel" [tandis que Robin parlait de pénétration], "Ah la la, c'est trop fort ce que vous dites", c'est déjà énorme.

Pourquoi performeuse Muriel Robin ? Non pas qu'elle réussirait à faire croire quelque chose auquel elle ne croît pas, performeuse parce qu'elle a réussi à rendre Pierre Arditi, qui était à ses côtés, mesuré et tempéré ... ce qui est une performance. Revenons donc sur ce buzz ...

Si le fond mérite de la nuance, la forme est insupportable. Déjà l'interview en tant que telle ne fait qu'accumuler les relances alors que l'artiste essaye de donner de la gravité et du fond à son propos, quoi qu'on en pense. Entre Dechavanne et Salamé [toujours plus indigeste qu'un mauvais salami], c'était un concours à telle enseigne que le propos en a été rendu décousu et, finalement, moins lisible. En outre, on ne peut que s'étonner du fait que Muriel Robin clame si haut et si fort qu'elle va tellement bien et que tous les problèmes sont derrière elle alors qu'à longueur de temps, elle ne cesse de s'exprimer sur des sujets dont il faudrait être aveugle pour ne pas voir qu'ils ont une prise encore tenace sur elle. Mais la forme étant une chose, il convient de ne pas s'arrêter à cela.

Sur le fond, le propos mérite tout de même un peu de nuance au delà de la personnification excessive donc ridicule à laquelle s'est livrée l'ex meilleure amie de Pierre Palmade qui se demande d'ailleurs si elle a jamais été son amie. 
Là où Muriel Robin a raison, c'est lorsqu'elle ramène la condition de l'acteur/actrice à sa propension à susciter le désir chez le spectateur potentiel. Précisons immédiatement que contrairement à Muriel Robin, il convient, pour être un peu honnête, de ne pas focaliser sur le seul cinéma mais bien sur toute l'industrie du spectacle comprenant certes le cinéma mais aussi la télévision, le théâtre, le spectacle vivant dans son ensemble ... bref tout ce qui suppose une mise en scène. Oui, pour incarner un personnage et opérer la transfiguration, il faut provoquer le désir. Voilà qui a toujours été et qui sera toujours, n'en déplaise à l'artiste qui a mis plus de 30 ans à accepter son physique et qui vient reprocher aux producteurs ne pas avoir eu raison avant elle la concernant, étant précisé qu'elle s'essuie aussi les pieds sur le fait qu'il est normal qu'on ne plaise pas quand on est gros(se). Chic ...
Elle résume cela à la capacité à être pénétrée ... on peut aussi rester élégant et parler de désir pour moins exprimer la frustration de la pénétration comme si le désir ne se résumait qu'à la pénétration d'ailleurs. M'enfin ...

Une fois ce point de convergence évacué, le reste du discours pose quand même problème. S'il ne peut être contestable que mettre en avant son homosexualité change le regard de beaucoup [on peut le déplorer, c'est ainsi et la normalisation en cours n'est pas encore totale et ne le sera probablement jamais], il est peut-être aussi plus intelligent de ne pas consolider la dérive que l'on dénonce en l'adoptant et lui conférant même une forme de légitimité justifiant alors qu'on ne propose pas de rôles à des acteurs/actrices concerné(e)s. J'ai lu qu'il fallait louer la parole ainsi prononcée au motif qu'elle est le constat d'une triste réalité. Au pragmatisme, je ne peux hélas voir que de la reddition. Et cette reddition n'est pas innocente, elle sert à se victimiser. Et là, en la matière, on a eu le droit à un festival aussi mal joué que sa consternante prestation dans "Les Visiteurs 2" dont évidemment tout le monde explique qu'elle n'y est pour rien puisque c'est la faute du metteur en scène qui voulait singer Lemercier. Victimisation quand tu nous tiens ...

Que le monde du cinéma ou du spectacle vivant dans son ensemble n'échappe pas à un relent d'homophobie plus ou moins caractérisée n'est pas franchement un scoop. Qu'on en fasse l'explication cardinale de ce que tous les acteurs/actrices homosexuel(le)s ne trouvent pas de rôles à la hauteur de leur talent ou que cela explique que tout un tas de gens refusent de dire qu'ils sont homosexuels pour échapper à une telle opprobre, c'est un peu court n'en déplaise à Salamé dont la mâchoire se décrochait à mesure qu'elle comprenait que oui des gens sont stigmatisés parce qu'ils sucent des bites alors qu'ils ont du poil au menton. Pour le coup, Salamé jouait mieux bien que ce fut l'idiote ... était-ce un jeu ? N'empêche, le discours de Robin est à vomir en ce qu'il résume le talent au fait de ne pas être homosexuel, ce qu'elle dénonce en en acceptant, avec douleur j'en conviens, les conséquences pour mieux se victimiser. En outre, elle trouve là la seule explication au fait qu'elle n'a pas fait de carrière cinématographique, ce qui ne peut évidemment être le fait d'un jeu trop standardisé, d'un mal-être ne permettant pas d'endosser des rôles ou que sais-je encore. Au surplus, elle se targue d'être la seule "au monde" [elle n'a pas parlé de l'univers interstellaire mais en la chauffant un peu plus, on y avait droit] à avoir expliqué qu'elle était homosexuelle depuis le début de sa carrière, ce que les autres n'ont jamais eu les couilles de faire. A ce niveau de melon, on est forcément à Cavaillon. En tout cas, celles et ceux qui ont cru nécessaire d'expliquer qu'ils étaient homosexuel(le)s apprécieront d'être niés ... au point qu'elle s'est crue autoriser à dresser une liste de placardisés et, avec son air malin, affirmer qu'elle avait les noms des trouillards qui n'ont pas eu son cran, celui de flinguer leur carrière. Au delà du fait que le coup de la liste occulte est répugnant, c'est surtout que non, Muriel Robin n'est pas la seule au monde à avoir dit qu'elle était homosexuelle. C'est d'autant plus certain qu'elle a longtemps expliqué qu'elle était bisexuelle, justement comme Kirstin Stewart dont elle dénonçait en quelque sorte le choix tactique pour préserver sa propension à être désirée. La seule au monde ... la France cherchait un truc pour reconstruire le récit national, on l'a trouvé !

Et comme si cela ne suffisait pas, Mumu la taulière qui en a trop soupé y va de son petit conseil de vétérane [qui, évidemment, est passée au dessus de tout cela après avoir pleuré toutes les larmes de son corps pendant des années, dixit] : tu es gay ? Ne le dis surtout pas si tu veux faire carrière. En gros, ne sois pas honnête comme Mumu, sois plus malin parce que le monde est pourri. Et bien avec des arguments pareils, il y a bien des choses qui n'auraient pas pu être possibles, y compris pour Muriel Robin. La fierté d'être toi ? T'es bien gentil de ne pas trop en parler et de garder pour toi tout ça si tu veux bien hein ! Mamie Mumu a trinqué, il ne s'agirait pas que tu puisses avoir l'espoir que les choses se passent mieux pour toi. Et cela renforce précisément les dérives et les comportements qu'elle dénonce. Mais attention, elle a le joker, c'est "la seule au monde" proclame-t-elle devant les yeux sidérés d'Arditi qui, comme d'autres, avait plein de contre exemples qui ne passent pas forcément par Erroll Flynn ou Jean Marais. Mais non mais non : Muriel Robin est la seule au monde ! Franchement, ce sketch n'est même pas drôle, il est affligeant et démonstratif du fait qu'une thérapie n'a pas été au bout. Neil Patrick Harris [à l'affiche notamment du dernier épisode de la franchise "Matrix"] ne ferait donc plus de carrière depuis qu'en 2002 il a déclaré être homosexuel ? Lambert Wilson  n'a pas été premier rôle de plein de films depuis qu'en 2016 il a confié sa bisexualité ? Il a encore été nommé pour le César du meilleur acteur pour "De Gaulle" en 2021 ! Ah mais il est bisexuel, ce n'est pas pareil ... [m'enfin comme Muriel Robin pendant des années au fil de ses interviews]. Xavier Dolan, qui, lui, a reçu plusieurs César et plusieurs prix du jury à Cannes, ne doit pas compter non plus parce qu'il est étranger donc Muriel est la seule au monde en France certainement. Matt Bomer ? Ben Whishaw ["Q" dans la franchise ultra commerciale 007 notamment], marié officiellement à un homme depuis 2012, qui accumule les récompenses et notamment le British Academy Television Award en 2023, ça ne compte évidemment pas non plus ... y a que Muriel qui est la seule au monde ! Et je ne parle même pas des chanteurs/chanteuses qui invalident les propos de la mère Robin [tiens, au passage, juste Angèle] ni même des réalisateurs ouvertement homosexuels dont la carrière ne s'est pas vraiment interrompue.

Ce qui me dérange le plus dans les propos de Muriel Robin, ce n'est pas qu'ils sont approximatifs et excessifs [donc insignifiants]. C'est tout l'égocentrisme qui se cache derrière et sous couvert de flatter son égo, elle en tire des généralités qui ne collent pas à plein de gens et qui se veulent pourtant universels puisqu'elle est la seule au monde ! Pour apaiser ses frustrations, elle balance des bêtises aussi consternantes que sa carrière cinématographique [qui s'explique peut-être parce qu'elle est homosexuelle mais aussi parce qu'elle n'a pas su (se) convaincre], en particulier les comédies. Muriel Robin croit encore que jouer des rôles dramatiques devraient ouvrir, comme pour Coluche, à la consécration et donc à la récompense automatique. Bah non ... et les problèmes de nombril, cela se règle chez le thérapeute plutôt que fantasmer d'être la seule au monde à avoir eu le courage de ...
Finalement, tout cela me rappelle les déclarations de son ex-ami Palmade qui, en 2013, avait expliqué sur Europe 1 :"Je ne l'aime pas, mon homosexualité, je suis vraiment triste [..] Avant, j'étais en colère, maintenant, je suis juste triste d'être homo. Mais tant pis… Je me trouvais fait pour les femmes, pour les faire rire, les protéger, tout ce qu'on voit dans les films et les Walt Disney. Donc, voilà, j'essaie d'en rire, de m'en moquer, de m'y faire, car il va bien falloir que je m'y fasse. Si je veux tomber amoureux d'un mec, il va bien falloir que, d'abord, je m'aime moi." Manifestement, ces deux là avaient des choses en commun ...

Tto, qui se demande encore qui était la plus insupportable de Robin ou Salamé

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Commentaires
J
Le problème, c'est que son discours, puisé aux sources d'un wokisme mal compris et mal assimilé, est devenu dominant, y compris dans les programmes scolaires où, on formate les mômes à rechercher les causes de leur échec dans l'autre qui discrimine et non dans ses erreurs de parcours personnels, le tout encouragé jusqu'à la caricature par la France Insoumise et sa logique révolutionnaire totalitaire.
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