Valérie était depuis le début de l'année scolaire ma meilleure copine de la vie et de l'univers. On était en seconde, elle redoublait cette seconde pour pouvoir enfin accrocher une 1ère S (la sacro-sainte voie royale à laquelle tous les parents aspirent pour les rejetons sauf les miens qui avaient compris depuis longtemps que j'étais une cause un peu perdue pour les maths depuis que j'avais réussi l'exploit d'avoir une note moins bonne à un contrôle de rattrapage qu'au premier contrôle !).

C'était bizarre nos relations puisque j'étais secrêtement amoureux d'elle, on se parlait au téléphone tous les soirs pendant deux heures (ce qui provoquait la fureur de mes parents qui ne comprenaient définitivment pas comment on pouvait passer son temps et devant la télé et pendu au téléphone), elle me bassinait avec son mec (une amourette en réalité) qui manifestement n'en avait rien à carrer d'elle et comme un fait exprès, on s'engueulait tous les mardis après-midi. Je trouvai ça rigolo que l'on se quitte inexorablement en se faisant la gueule le mardi soir ...

Vers 18h, on s'appelait et on refaisait la journée du lycée en bavant sur machin qui était un vrai connard fini, l'autre pouf totalement écervelée et qui rigolait comme une cruche qu'on agite. On refaisait le monde, parlait de ses petits problèmes (mineurs en réalité) avec ses parents ... bref deux vrais ados.

Ce soir là, je quitte Valérie vers 18h40 parce qu'on avait épuisé tous les sujets de discussion : cela faisait au moins deux heures qu'on parlait et elle comme moi avions du boulot sur la planche, notamment un fichu devoir d'histoire-géo à rendre pour le lendemain ... et on n'avait rien commencé ! Trop les boules quoi !!! Je raccroche, monte dans ma chambre et je m'atèle à disserter sur les apports modernes des civilisations romaines et grecques (pa - ssio - nant !).

Quelques minutes plus tard, j'entends à nouveau le téléphone qui sonne. Ma mère qui repassait au sous-sol me demande d'aller répondre, je gueule pour le principe parce que bon, pour une fois que je m'étais mis à bosser, il faut que j'aille répondre ...
- Allo ?
- Allo tto ?
- Oui Valérie ... Ça va depuis tout à l'heure ?
- Euh non, ça va pas. [voix blanche et inconsistante]
- Ben qu'est ce qui va pas ? Ça allait tout à l'heure ...
- Tto, je viens de faire une connerie.
- [voix grave et monocorde comme je fais très bien quand ça part en c*******] Qu'est ce qui se passe ?
- Tu sais, j'en ai marre de tout. Cette vie, c'est carrément pas possible.
- Mais attends, qu'est ce que tu racontes là ?!?
- Non laisse moi te parler, j'en ai plus pour très longtemps ... Je voulais ..
- [Je gueule] Comment ça t'en as plus pour très longtemps ? Qu'est ce que t'as fait ?
- M'engueule pas. J'ai avalé trois boites de médicaments. Dans dix minutes, ça sera fini.
- PUTAIN MAIS C'EST PAS VRAI !!! Mais qu'est ce que tu me racontes là ?!?
[Elle éclate en sanglots. Je reprends la conversation.]
- Où sont tes parents ?
- Ils vont rentrer dans une heure
- Qui est là pour t'aider ?
- Ya personne ... Y a plus que toi.
- Mais bordel Valérie. Je ne peux rien moi. T'as vu comment on habite pas tout près ? Tu vas sortir et aller tout de suite voir ta voisine. Tu lui expliques et moi j'appelle les pompiers et les flics.
- Non, j't'en prie. De toute façon, j'ai plus la force.
- C'est quoi que tu as avalé ?
- J'sais plus [sa voix commence à se ramollir], j'sais plus où jj''aaaaiii mis les boites
- Valérie écoute moi ! Tu tiens à moi ? Si tu tiens à moi, tu vas sortir tout de suite et aller dans la rue.
[Je raccroche, appelle les pompiers, la police et tout et tout]

Ma mère m'ayant rejoint me demande ce qui se passe, commence à paniquer davantage que moi (faut dire que j'ai une propension à garder mon sang froid qui m'étonne un peu moi-même de temps en temps) et me demande si je veux aller chez Valérie. Je lui réponds que je ne vois pas bien ce que cela changera que j'y aille ou pas. On laisse passer quelques minutes, les flics me rappellent pour me dire qu'ils l'ont trouvée chez des voisins comme je leur avait indiquée qu'elle pourrait probablement se trouver.

Une demi-heure parès, je rappelle chez Valérie, je tombe sur sa mère, en pleurs ...
- Bonsoir Madame, c'est tto
- Snfff snfff Bonsoir tto
- Je vous appelle pour savoir où en est Valérie. J'ai appelé les pompiers qui m'ont confirmé qu'ils l'avaient prise en charge.
- Oui oui, elle est à l'hôpital, ils vont lui faire un lavage d'estomac parce qu'elle en a pris beaucoup vous savez
- Ben oui je crois, c'est en tout cas ce qu'elle m'a dit.
- C'est une chance qu'elle vous ai appelé, vous savez sinon elle serait morte à cette heure [elle repart à pleurer]
- Effectivement, c'est une chance. Je vais vous laisser.
- Permettez-moi de vous rappeler plus tard.
- Aucun problème Madame. Bon courage.

La mère de Valérie m'a rappelé le lendemain pour me demander pourquoi elle avait fait ça. Je lui ai dit que je l'ignorais totalement mais qu'elle le lui dirai certainement un jour.

Voila, c'est comme ça que ça s'est passé.

Tto, SOS DETRESSE AMITIE