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Il n'est pas de secret sur l'affection que je porte au sujet de la couleur bleue.

Dès lors, comment ne pas voir un ravissement sur l'émergence du réseau Bluesky ? Comment oublier que j'ai toujours un truc bleu sur moi ? Comment oublier que je dispose d'environ soixante cravates bleues ? Comment ne pas voir dans les couleurs du logo d'UNE VIE DE TTO l'évidence faite reine de ce que j'aime cette couleur ?

Et pourtant ...
Tout ce qui est bleu n'est pas sans provoquer chez moi quelque difficulté. Mais oui, nonobstant le fait que j'aime délibérément la couleur, la symbolique et tout ce qui va avec, il y a un truc bleu que je redoute. 

Les schtroumpfs ? Pas du tout, je me passionne pour le modèle politique et la sexualité les concernant.
Des billes ? Je préfère jouer avec des boules désormais, et de préférence pas bleues.
Des rubans ? Du papier ? Une serviette ? Des champignons ? Ah les champignons bleus ... c'est en Nouvelle-Zélande que j'en ai croisés. Mais non, pas ça.

En fait, c'est d'un film dont il s'agit : "Le Grand Bleu".

Et parce qu'il était diffusé hier, j'ai évidemment tout fait pour y échapper parce que je connais les effets ravageurs de ce film sur moi. Pourtant, j'aime tout dedans [sauf quelques facilités de montage et deux longueurs inutiles]. Mais sinon tout.

Le grand bleu : la critique du film - CinéDwellerBon déjà, j'appartiens à cette génération qui y a vu un film iconique, l'expression de son envie de liberté, de son affranchissement à la pesanteur de vies prédéfinies, de son éveil à une forme d'individualisme presqu'égoïste ... oui, j'avais 13 ans quand "Le Grand Bleu" est sorti en salles, à la faveur d'une fête du cinéma qui coïncidait souvent avec mon anniversaire.

Comme beaucoup, j'ai écouté en boucle les notes d'Eric Serra, j'ai été amoureux de Jean-Marc Barr à qui j'aurais fait tout plein de bébés, j'ai adoré cette sensation de plongée et j'ai pleuré [toujours au même endroit] toute l'émotion à laquelle le chemin scénaristique nous amène. Oui, "Le Grand Bleu" est ce film qui me fout une claque à chaque fois même si certains aspects en semblent un peu datés aujourd'hui parce qu'il en ressort une sensibilité que beaucoup ont assimilé à de la mièvrerie. Moi pas.

Je fais partie des neuf millions de français qui sont allés le voir au cinéma. Je fais partie de ceux qui frissonnent dès la première note du générique. Et pourtant, je fais aussi partie de ceux qui redoutent la diffusion du film parce qu'il me plonge dans des états abyssaux, sans mauvais jeu de mots. La raison est finalement assez simple : au delà de l'histoire qui émeut, le film me confronte à l'impossibilité de vivre pleinement la passion, au fait qu'on est jamais conscient de ce que l'on provoque chez l'autre, à la fatalité d'une forme de désespoir et probablement à la frustration ultime qui consiste au renoncement. Oui, j'y vois tout cela qui, avec les émotions charriées par le récit, rendent le film assez difficile pour moi, en plus de la beauté incroyable de Jean-Marc Barr.

Pourtant et parce que c'est peut-être là mon seul masochisme, je l'ai revu plusieurs fois [mais pas hier soir]. Oui parce que j'aime bien revenir tutoyer l'adolescent que j'étais, perdu dans le fracas de problèmes intérieurs qui n'étaient pas de mon âge. Ce film est finalement une porte ouverte sur celui que j'étais au moment où je l'ai vu la première fois et où j'ai ressenti des émotions inédites. Je ne parle pas seulement d'avoir été sensible à la beauté d'un homme, je parle surtout de cette ligne de crête dans une relation amoureuse qui oblige à composer sans se décomposer, à ne pas s'oublier tout en privilégiant l'autre avec qui on vit. Ce film parle de cela et à une époque où j'avais goûté au poison des sentiments utilisés de la pire des façons, l'océan s'ouvrant ainsi sur une telle terre promise m'avait mis une claque énorme. On pouvait donc être heureux en aimant quelqu'un même si l'on pouvait lui faire aussi très mal, mais ça je l'avais déjà expérimenté douloureusement.

J'aime le bleu et "Le Grand Bleu" mais lui, je le crains parce qu'il est cette passerelle vers ce vers quoi j'aime tendre sans vouloir y croire. Il est des passerelles cinématographiques, artistiques, musicales, ou d'autres natures qui me sont fondamentales et que je réprouve pourtant à emprunter. Il y en a tant ...

Tto, qui aime le bleu