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une vie de tto
18 mai 2022

Tu vois le genre ?

Tu vois le genre

C'est donc cela la grande affaire : Elisabeth Borne à Matignon.
Au moins, la promesse est tenue pour tout le monde : une femme, une femme fidèle au Président, une femme fidèle au Président sans aucune ambition de lui faire de l'ombre.
Pour autant, est-ce une bonne chose que de nommer Elisabeth Borne parce que c'est une femme ?

Spontanément, j'ai toujours eu envie de répondre affirmativement à cela. Oui, c'est tout de même sidérant de se dire qu'il faut attendre d'être en 2022 pour parvenir à nommer une seconde femme en qualité de cheffe du gouvernement. Le précédent Edith Cresson a laissé quelques traces mais, malgré les déclarations incantatoires, il n'aura donc jamais été possible de trouver le moyen de désigner une nouvelle femme à ce poste avant lundi soir dernier. Cependant, on observera néanmoins que la parité a fait un sacré bon avant depuis 2017 ... même si cela n'est pas satisfaisant pour autant.

Donc tout cela irait pour le mieux si l'on ne réduisait pas la nomination d'Elisabeth Borne au seul fait qu'il s'agit d'une femme, en expliquant derechef qu'elle a tout de même tous les attributs d'un comportement masculin hautement carricatural. En effet, on la décrit cassante, bosseuse jusqu'à des heures pas possible, exigeante au plus haut point, condamnant ses collaborateurs au burn-out en deux temps trois mouvements ... bref autant de merveilleux traits de caractère qui rassurent les hommes voyant débarquer une femme à un poste qui leur était réservé. 
Oui mais voilà, au delà de cette pirouette qui ne tranquilise que ceux qui veulent bien l'être ainsi, il y a tout de même une chose qui est dérangeante : il fallait nommer une femme. Pour les raisons précisées précédemment, l'intérêt était évident mais était-il suffisant ? Justement non. Nommer une femme pour nommer une femme revient, comme je le dis à chaque fois que je suis confronté à devoir gérer un mécanisme incitatif de parité, à transformer la manoeuvre vertueuse en un camouflet. En effet, parce qu'il faut nommer une femme, on fait donc du genre un critère nécessaire et suffisant alors que cela ne devrait pas être le cas. Finalement, sous couvert de donner plus de représentativité, on transforme encore plus en objet celle qui est concernée, la traitant finalement comme un élément de décor ... comme un pot de fleur qu'il fallait mettre parce qu'on avait décidé que cela manquait. Le fait est, en l'occurrence, qu'on est tous d'accord que cela fait défaut mais faut-il réduire quelqu'un à son genre pour en justifier la nomination ? Bah non ... sinon demain, on devra justifier de nommer une personne de couleur, une personne de petite taille aussi, quelqu'un dont les préférences sexuelles ne sont pas majoritaires et c'est ainsi que la boite de Pandore des critères s'ouvre pour ne jamais pouvoir se refermer.

La compétence et l'aptitude à remplir la fonction devraient être les seules aiguilles de la boussole mais cela ne va pas assez vite et ne suffit pas à déconstruire les mécanismes patriarcaux ien installés. Alors, on sacrifie à l'exercice de se forcer, de se contraindre à raison du seul genre et c'est tellement réducteur que cela en devient terrible. Présenter la nomination d'Elisabeth Borne comme une avancée parce que c'est une femme, c'est tuer le débat et la critique sur tout le reste et notamment ses prises de position, ses capacités ou que sais-je encore. 
Comme une évidence, les articles n'ont pas tardé sur sa situation familiale [ce que l'on ne fait jamais pour un homme] rappelant en sous-titres qu'une femme qui ne se consacre pas à sa vie familiale mais à sa carrière professionnelle, c'est curieux sinon étrange. En cela, les journalistes foncent dans le panneau que le Président de la République leur présente sans beaucoup de discrétion, et ça marche. Viendront plus tard les attaques sexistes mais qu'importe : l'essentiel est fait, Emmanuel Macron a été progressiste en nommant une femme. Le reste passera sous les radars et qu'importe si Elisabeth Borne a les épaules pour le job : il fallait surtout qu'elle soit une femme.

Tto, qui trouve qu'il y a là bien peu de féminisme

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