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une vie de tto
30 novembre 2021

La venette, mérite la confiance

C'est une conversation téléphonique hier soir qui m'a achevé. Alors que j'étais ravagé par la fièvre qui montait tout ce qu'elle pouvait [au point que ma meilleure montre du monde m'avait alerté plusieurs fois dans l'après-midi que mon cœur battait trop vite], le téléphone sonne et quand cela sonne, c'est forcément ma mère puisque je crois qu'il n'y a qu'elle qui dispose du numéro. 

Voix d'outre-tombe ...
Le monologue a commencé pour me parler du fait que le temps est moche, qu'elle est fatiguée parce que son cousin est parti le matin même et qu'il a fait plein de choses avec mon père ... d'ailleurs mon père se fait arracher plusieurs dents. Hein quoi ? Tu ne t'en souvenais pas ? Bah si ... ah bah non, peut-être qu'il ne te l'a pas dit mais voilà, tu pourrais presque t'intéresser quand même. Et donc, ça va pas ? Ah, t'as fait ton rappel ? Ah bon ? Ah bon tu lui as dit samedi quand elle a appelé ? Oui et ? Elle, de toute façon, c'est jeudi. Et puis bon, c'est l'angoisse Noël parce qu'elle le sent bien qu'on va être reconfinés. Hein, tu pourrais le dire qu'on va être reconfinés. De toute façon si tu ne dis rien, c'est bien que tu as l'info et que tu ne veux pas lui dire. Et au fait pour les cadeaux, tu participes au cadeau de ton frère ? Ah t'es pas au courant non plus ? Ah non mais tu pourrais aussi être au courant, pfff c'est vraiment fatigant quand même. Bah de toute façon, eux ils donnent quelque chose mais le cadeau est déjà acheté. Tu verras bien. Bon bah sinon, pas grand chose à te dire donc voilà.

J'ai évidemment ponctué de "hum" et de "han han" cordiaux mais aussi froids que le discours d'en face où l'égoïsme le disputait à l'absence d'écoute.
Je dois l'avouer : cela m'a beaucoup atteint. Oh ce n'est pas la première fois, c'est simplement qu'hier, je n'avais pas la force de me dire que ce n'était pas grave, de relativiser le fait que ma mère vit en vase clos entre ses bobos, ses angoisses, sa retraite qui se passerait mal [alors qu'elle a peu près tout pour qu'elle se passe bien] et les cadavres dans les placards liés aux querelles familiales depuis 50 ans. Ajoute à cela le fait que chaque fin d'année, on apprend toujours avec une régularité de métronome suisse que ce sera indubitablement la dernière fois pour elle et que le repas de Noël se prépare toujours dans une frénésie qui confine à la crise de nerfs [ajoute à cela le sapin, le menu, le découpage de/des journée/s ...]. Jadis, je prenais du recul et de la distance avec cela en me disant que l'essentiel était ailleurs. Mais depuis quelques années, je vois mes parents vieillir, se rabougrir à la vitesse de l'éclair quand il ne s'agit pas de nous projeter, mon frère et moi, dans des perspectives pas franchement réjouissantes. Et donc, devant ce mur d'incompréhension [semblable à celui qui fait que je me prends des réflexions parce que je ne réponds pas au téléphone alors que je suis criblé de réunions ou que mon rythme de travail est peu entendu], j'ai été profondément accablé.

J'ai écrit un message à mon frère ce matin pour lui confier tout cela, il m'a répondu quelques minutes après pour m'expliquer qu'il comprenait bien qu'il mette aussi cela en perspective du fait que je ne supporte plus grand chose et qu'il serait peut-être temps d'accepter de me faire aider ou de lâcher un peu la pression.
Oui oui, et non bien que je ne sache pas forcément ce qu'il faut faire. Il m'a invité à en parler directement à ma mère ce qui est assez peu envisageable sauf à provoquer une discussion difficile où le chantage affectif et les larmes serviront d'arguments comme à chaque fois [tout ce que je déteste, pour des raisons qui tiennent justement à de telles expériences].

Alors oui pourquoi j'écris tout ça ?
Parce que j'ai entendu que mon frère s'inquiète énormément pour moi. Je ne dis pas qu'il a tort, je dis même qu'il a raison de s'inquiéter de me voir m'enfoncer chaque jour davantage. Certes, rien n'est fondamentalement grave puisque je n'ai pas besoin de me dire que ma mère écoute ce que je lui dis, qu'elle fait passer ce qui me concerne avant ses préoccupations qui, objectivement, ne sont pas si difficile surtout si on les remet en perspective. Non non, rien n'est grave ... c'est juste qu'hier soir, avec la fièvre et les douleurs liées à ce fichu rappel, je n'avais pas besoin de ressentir cela encore, je n'avais pas besoin d'être confronté à cela encore.
Oui mon frère s'inquiète, oui mon mari s'inquiète aussi. Ce serait mentir que de dire que je m'inquiète pas moi-même. Après tout, c'est ainsi et tant que cela tient, cela tient.

Tto, qui voit les gouttes s'accumuler dans un vase probablement déjà trop plein

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Commentaires
J
Je ne pourrais à nouveau pas mieux dire que Brozeur ! Oui on s'inquiète !<br /> <br /> <br /> <br /> Je me rappelle un de tes derniers billets où tu évoquais justement le fait que tu "aimais" écouter, conseiller les autres grâce à cette écoute et que lorsqu'il était question de toi, d'être écouté par d'autres, tu avais tendance à ne (plus) rien dire, à te réfugier derrière cette timidité, etc... Même si tu as toujours été, pour moi, de bons conseils à maintes reprises durant ces dernières années (et je ne peux que t'en remercier), je sais que celui qui aide/écoute à tout autant besoin de l'être à son tour. Certes ce n'est pas un exercice facile.<br /> <br /> N'ayant pas le même passif familial que toi, j'ai aussi été écorché par la vie et j'ai courbé le dos. J'ai pris l'habitude de dire qu'il y avait pire au monde que ce que je traversais, que les problèmes allaient s'amenuiser voire disparaître et que surtout, les problèmes des autres passaient avant les miens. Mais pendant ce temps et même après, le corps et l'esprit trinquent. On ne dit rien, on attend que ça passe mais le corps et l'esprit ont de la mémoire et nous le font payer.<br /> <br /> Pour exemple (il vaut ce qu'il vaut mais c'est celui qui est à mon sens parlant) : mon ancien responsable de service était tout autant à la disposition des autres, sollicité à tort à travers au niveau professionnel et personnel et faisait passer ses soucis en second plan. Un jour, son médecin lui a dit (suite à un énième blocage de dos) : "vous continuez comme ça encore quelques temps et vous êtes mort à votre retraite ! Vous vous usez à longueur de journées et au moment de la relâche, le corps ne suivra pas ce changement radical de vie et vous mourrez ! Vous voulez voir grandir vos petit-enfants ? Changez... même un peu mais changez !" Il a fallu que sa mère ait une crise cardiaque un après-midi deux mois après, qu'il reçoive un appel au boulot l'informant qu'elle était massée depuis quelques minutes pour faire redémarrer le coeur, qu'il "s'en veuille de ne pas finir le travail qui lui avait été donné" pour se rendre compte qu'il ne pouvait plus continuer comme ça dans les deux domaines, privé comme professionnel.<br /> <br /> <br /> <br /> Depuis ce jour, et le décès de sa mère, il a décidé de changer même s'il était encore à quelques années de la retraite. Mais la vie et la santé sont des choses trop précieuses et il avait compris le message malheureusement avec tristesse.<br /> <br /> <br /> <br /> Donc oui tu es quelqu'un de fantastique niveau écoute mais essaye d'accepter de l'être à ton tour.<br /> <br /> <br /> <br /> Gros bisous.
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B
Mais bien sûr qu'on s'inquiète !<br /> <br /> Après ça n'empêche pas d'être maladroit ou de se prendre les pieds dans le tapis...au moins tu as compris l'essentiel : non il ne s'agissait pas de relativiser ni de minorer, juste d'expliquer (avec les clés que j'ai) et de rappeler ce que tu sais déjà, et surtout te rappeler d'être vigilant (attentif) à ton bien-être...<br /> <br /> Et puis c'est cool de voir que tu as pris la peine de m'écrire, de partager spontanément...de finalement avoir écouté et compris les attentes de ton petit frère qui a passé plus de temps à bénéficier de ton soutien qu'à te renvoyer l'ascenseur.<br /> <br /> Oui mais voilà, il y a cette dernière phrase, celle que je n'ai cessé de me répéter comme un mantra depuis 7 ans : " tant que ça tient, ça tient".<br /> <br /> Ça glace le dos parce que je connais l'inéluctable fin (je suis en plein dedans), je sais par quoi tu risques de passer (et non, tu ne sais pas tout, ça vaut mieux)...et surtout parce que c'est faux, c'est un appel désespéré à l'aide qui ne dit pas son nom, c'est se donner l'illusion de contrôler l'inacceptable.<br /> <br /> Et quand ça ne tiendra plus ? Alors beaucoup de choses s'écrouleront mais il restera quand même nous et les choses les plus importantes
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