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une vie de tto
6 octobre 2021

Les forces de l'esprit

IWAK

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Dans son testament politique que furent le vœux adressés à la Nation le 31 décembre 1994, François Mitterrand employa cette expression "les forces de l'ESPRIT".

Ah oui, cela résonne toujours dans la tête de celles et ceux qui reçurent ce message, sans pour autant verser dans la nostalgie idolâtre du président. "Les forces de l'ESPRIT", voilà bien une tournure quasi mystique qu'on n'avait pas l'habitude de voir poindre dans ce type de moments politiques. D'ailleurs, il n'en a plus jamais été question depuis ...

On a beaucoup brodé, écrit, glausé sur les illuminations crépusculaires du Mitterrand s'enfonçant dans un trépas qu'il savait proche. Pourtant, les forces de l'ESPRIT sont aussi le thème d'un livre de Marie de Hennezel qui relate l'accompagnement de fin de vie et les outils psychologiques disponibles au service de ceux qui partent et de ceux qui restent.

Au passage, j'ai toujours été surpris du fait que "les forces de l'ESPRIT" aient écrasé un autre message autrement plus fort : "Mes chers compatriotes, c'est la dernière fois que je m'adresse à vous pour des vœux de nouvelle année en ma qualité de président de la République. Aussi je me permettrai deux recommandations. La première: ne dissociez jamais la liberté et l'égalité (...). La seconde: ne séparez jamais la grandeur de la France de la construction de l'Europe. C'est notre nouvelle dimension, et notre ambition pour le siècle prochain." Pour faire ce billet au thème imposé, j'ai relu ce discours et je crois être à chaque fois frappé par le côté visionnaire de celui-ci ... bref.

"Je crois aux forces de l'ESPRIT et je ne vous quitterai pas." conclut donc le Président de la République au soir du 31 décembre 1994.
J'avoue que, nonobstant un cartésianisme féroce, je verse aussi dans cette croyance que rien ne prouve. Oui, j'y crois parce que j'y recours. J'ai eu la chance d'avoir des grands parents fantastiques et particulièrement une grand-mère paternelle qui m'adorait [parce que j'étais le premier descendant mâle de lignée, mais pas seulement]. Le décès de ma grand-mère, alors que je n'avais pas sept ans, a été une vraie rupture pour moi, me confrontant à l'absence de ce coton douillet qu'elle permettait. Il ne se passe pas une semaine sans que je me souvienne de moments passés avec elle et mon grand-père. C'est elle qui m'a donné le goût du riz au lait, qui m'a fait planter mes premiers haricots, qui m'a habitué à jouer [nous jouions aux petits chevaux] ... c'est elle qui a représenté tant pour moi que nul ne peut l'entendre ni le comprendre. Son trépas a donc été un tel choc que j'ai effacé de ma mémoire la dernière fois où je l'ai vue, sur son lit de mort à l'Hôpital américain de Neuilly sur Seine. Oui, j'ai occulté tout cela parce que cela ne sert à rien, je préfère conserver l'image de cette femme frêle au regard toujours teinté d'un peu de tristesse [je comprendrai pourquoi plus tard] et qui m'a tant aimé.

C'est un peu elle que je retrouve lorsque je devise pendant des heures avec des personnes âgées, elle que je recherche aussi parce que plusieurs fois dans ma vie, elle m'a tant manqué. Oui, plusieurs fois quand les ténèbres ont faillis e refermer sur moi, j'ai ragé qu'elle soit partie. Comme un assoiffé qui croise un oasis, je me suis accroché à celles et ceux qui l'ont connu et qui ont pu me parler d'elle. Mais avec le temps, j'ai aussi appris une chose : elle est toujours près de moi, par la force de l'ESPRIT du moins le sublime-je. Cette présence n'est pas obsédante mais elle est tenace et rassurante presque. Surtout, elle m'a beaucoup interrogé parce que je la sens toujours à des moments décisifs de ma vie. Quand j'étais sur la brèche, j'ai presque senti sa main me rééquilibrer. Quand j'ai hésité à faire des choses un peu limite, j'ai presque entendu sa voix. Lorsque j'ai couché pour la première fois avec quelqu'un, je suis parti quelques instants pour avoir ce dialogue avec elle, pour avoir son autorisation et qu'elle me dise presque "Vas-y, tu es grand maintenant, je serai toujours là mais il faut que tu vives ta vie."

Alors qu'on devrait penser à autre chose que sa grand-mère au moment où l'on va, pour la première fois, faire l'amour et jouir de et avec autrui, avoir pensé à ma grand-mère m'a beaucoup troublé. J'y ai vu une symbiose qui peut paraitre étrange mais qui, en réalité, est le pendant d'un besoin d'amour que je savais authentique et d'une phobie de l'abandon. Oui, les forces de l'ESPRIT ne me conduisent pas à vivre sous le joug fantasmé d'une aïeule décédée en 1982, les forces de l'ESPRIT me font sentir qu'elle est toujours là près de moi, qu'elle me donne cette tape sur l'épaule quand il faut me rassurer, cette pousse dans le dos quand l'entrain me manque, ce sourire ou ces paroles quand il le faut. Il n'est d'ailleurs pas rare que j'entende dans ma tête qu'elle s'agace quand je fais ma tête de cochon ou qu'il faudrait que je renoue le dialogue avec Zolimari alors que l'on se querelle pour des bêtises. Cette petite voix de tempérance et de raison, c'est souvent celle de ma grand-mère

Tto, qui croit aux forces de l'ESPRIT pour en avoir eu la preuve souvent. 

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Commentaires
M
J'avais été vachement marqué par le compte twitter de François Mitterrand qui était porteur de cette même expression pour expliquer son retour sur les Internets, et celui qui postait était tellement brillant dans le genre ! :D
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J
Beau post Tto émouvante communion d’esprit avec cette merveilleuse grand mère
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P
Très beau texte, cher Tto. Il est bon que les esprits forts croient aux forces de l'esprit et parlent de tendresse en évoquant leurs aïeux. J'espère retrouver une maman - grand-maman en la personne de Pepita, la maman de mon ami de cœur, Jean-Luc.<br /> <br /> Belle journée.
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