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une vie de tto
24 février 2020

Du côté de chez Fred

du côté de chez FredC'est souvent la même magie et il ne faut pas être grand mathématicien pour envisager qu'entre ceux que je connais et les audiences qui me sont rapportées, il y a un écart qui s'explique par le fait que de nombreux lecteurs restent tapis dans l'ombre. La magie en question consiste souvent dans le fait qu'un jour, une circonstance, un billet où j'ai employé un mot ou expliqué quelque chose provoque un électrochoc et un lecteur de l'ombre prend son courage à deux mains et me contacte.

A chaque fois, j'entends que c'était l'angoisse, que c'était compliqué parce qu'on ne sait pas comment je vais recevoir, que c'était le fruit de longues hésitations ... et à chaque fois, je lis que c'est génial de l'avoir fait. 

Fred fait partie des lecteurs de l'ombre. Il a presque mon âge, il a décidé un jour de me contacter parce qu'on lui avait fait remarquer que j'étais aussi sur Twitter, après qu'il ait lu mes écrits, qu'il s'y soit retrouvé ou qu'il ait partagé des émotions que j'ai fait passer. Fred est un garçon qui est sur un chemin que je connais bien même s'il s'aventure vers des endroits où j'ai décidé de ne plus aller. Fred est un homme bourré de contradictions comme tout le monde. Fred est un charmeur qui ignore la force de ses atouts pour préférer en mettre d'autres en avant alors qu'ils ne sont pas les plus séduisants. Fred a commencé à venir me parler et rapidement, nous avons parlé de lui.

Je me souviens que je sortais de l'hôpital en ce début de juillet 2017, opéré d'une hernie qui me clouait chez moi en me forçant à devoir lutter plus de trois quarts d'heure pour me lever du canapé. Aussi, la conversation nouée avec Fred m'a servi aussi d'échappatoire à mes douleurs et m'a aidé à ne pas me recroqueviller sur moi [comme le font parfois certains malades]. Fred m'a joué son couplet de mec désintéressé qui relativise tout mais comme le vernis craque parfois, il se fait rattraper par ses envies, ses doutes, ses tourments intérieurs. Fred a rapidement compris que je ne couche pas avec mes lecteurs ou d 'autres garçons qui me contactent comme ça mais nous avons échangé librement sur tout un tas de choses et notamment certaines de ses envies ou de ses frustrations. Parce que la vie de Fred ressemble à Fred : elle est complexe, écartelée entre des choses a priori peu conciliables et aussi elle gagnerait à être plus simple. Fred a été un candidat volontaire quasi idéal à mes questions, oui j'ai soumis Fred à la question. J'ignore s'il en a retiré quelque chose [mon petit doigt me dit que oui], moi en tout cas j'ai la ferme conviction que je le connais mieux. C'est toujours comme ça : je pose des questions très intimes pas pour le plaisir de violer des secrets inavouables, juste pour me faire une idée précise de qui j'ai en face.

En face de moi, il y a donc Fred, un robuste gaillard qui se trouve toujours trop gros alors qu'il est juste parfait. Il lutte contre des démons intérieurs depuis longtemps [je n'ai appris qu'il y a peu de quoi il retournait] mais préfère contingenter les univers. De nos discussions initiales, il n'avait rien voulu lâcher de sa vie du soir et des wikendes. Ce n'est que récemment, à la faveur d'un échange que j'ai provoqué parce que je n'avais plus de nouvelles de lui ... et que j'avais donc compris qu'il n'allait pas bien [il dira qu'il n'allait pas plus mal que d'habitude], qu'il m'a expliqué la blessure, la crevasse originelle qui a amplifié quelque chose qu'il n'a toujours pas voulu me lâcher, ce malaise de départ. J'aime beaucoup les gens qui ont du relief, qui ont des aspérités : Fred en a plein voire trop.

T'expliquer pourquoi le contact s'est fait, je l'ignore. Peut-être parce que Fred est un garçon sain, profondément. Il ne joue pas, il essaye d'esquiver ce qui le dérange mais finalement, en le prenant par la main, on va voir ce qui dérange. Je rebondis beaucoup sur ce qu'il m'écrit que je trouve hyper révélateur de ce qu'il est et qu'il refuse de voir. Puisqu'il m'a récemment ouvert la porte après que je l'ai convaincu que je pouvais l'aider, on défriche et je pulvérise les réponses toutes faites qu'il a l'habitude de balancer comme des épouvantails ou des leurres. Avec moi, ça ne marche pas, il le sait et c'est pour cela - je le pense - qu'il continue à me parler. Il parait que je l'ai fait pleuré plusieurs fois en racontant ce qui m'était arrivé : oui, Fred est aussi une boule de sensibilité [il te jurera le contraire]. Sauf qu'il est castrateur avec lui-même. C'est son paradoxe : il a besoin de se sentir considéré dans le regard d'autrui mais il se l'interdit de la plus violente des façons, jurant qu'il est totalement transparent. Il ne se reconnaît pas grand chose [sauf quelques centimètres bien placés à l'endroit où il faut pour tromper la difficulté d'une vie qu'il a l'impression de ne pas vivre] alors qu'il a de quoi surpasser ceux qu'il trouve supérieurs à lui.

De sa vie, je ne dirai rien d'autre parce que c'est notre pacte : il est dans l'ombre, il aime y rester sauf quelque fois pour en sortir furtivement par plaisirs. D'ailleurs, Fred n'est peut-être pas son prénom ... Mais demeure une question : pourquoi en parler aujourd'hui ? Je parle de lui aujourd'hui parce que je me le suis promis il y a peu, parce que c'est un billet que je lui offre. Je veux qu'il prenne conscience que l'aider sur son chemin n'est pas forcément bizarre ou étrange même si c'est surprenant. J'ai beaucoup d'affection pour cet homme qui s'imagine qu'il ne rime à rien alors que ses fuites sont un appel au secours que j'ai entendu. On n'explique pas la connexion que l'on peut ressentir avec quelqu'un, on se trompe parfois mais avec lui, le contact perdure. Surtout, j'ai toujours dit que je ne supporte pas l'idée de ne pas pouvoir aider quelqu'un si je le peux lorsque j'estime qu'il le faudrait. Pourquoi le faudrait-il pour lui ? Parce que je pense connaître sa façon d'être, j'ai eu jadis un regard équivalent sur les choses, je comprends ses doutes qui furent les miens, je n'ignore pas ses failles puisqu'elles me rappellent certaines des miennes.
J'ai accepté de rencontrer Fred, un midi. Il avait pris la précaution d'être accompagné d'un de ses amis qui pouvait le rassurer : Fred est un grand timide, je le sais parce qu'il n'y a qu'un chat qui reconnaît un chat. Je l'ai senti si mal à l'aise que j'avais choisi de le laisser un peu tranquille pour affronter de nouveaux repères initiés dans sa vie. Récemment, j'ai compris qu'il fallait lui tendre la main pour lui faire comprendre qu'il peut sortir du tourbillon duquel il se croit condamné.

J'avais envie de donner un peu de lumière du côté de chez Fred [pour rappeler cette émission télévisée intimiste de Frédéric Mitterrand programmée à la fin des années 80] non pas pour susciter l'envie de mieux le connaître mais pour qu'il se rende compte qu'il n'est pas transparent et clairement pas pour tout le monde. Transparent, c'est définitivement un peu court jeune homme puisqu'on pouvait dire ... Oh ! Dieu ! ... bien des choses en somme.
Te parler de Fred, c'est aussi lui dire qu'il a bien fait de sortir de l'ombre, que je l'en remercie et je suis très heureux qu'il ait eu ce courage [lui qui en manque tant à l'écouter] parce que j'ai vraiment beaucoup d'affection pour ce garçon.

Tto, qui trouve qu'il a de la chance d'avoir des lecteurs comme ça

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