Elle ne fut pas fait qu'à Marie ni même dans la perspective de provoquer l'arrivée de je ne sais quel Messie mais clairement pour annoncer le départ du perturbateur. C'est la seconde fois que je me livre à cet exercice savoureux de provoquer le choc en affichant un sourire radieux. Oui, je dois te le confesser : c'est un plaisir vraiment particulier que de disposer du sentiment d'avoir toutes les cartes en main et ce sentiment de puissance est assez jouissif [même si je sais, par expérience qu'il est fugace .. mais tout ce qui est pris n'est plus à prendre et je sais aussi me satisfaire de petits plaisirs comme celui-là].

Ainsi donc, nous avons piloté la façon de l'amener, de le dire, le contexte et tout et tout. Ma chef, un peu pas à l'aise pour ce genre de choses, m'a rapidement laissé la parole tout en jouant d'un subterfuge, celui d'annoncer l'arrivée le matin même d'une stagiaire. C'est donc ensuite que j'ai expliqué que j'allais prendre du large, quitter mon poste sans quitter la Compagnie chérie pour me consacrer à d'autres tâches ... les têtes se sont figées, les regards devenus perdus, hagards voire noirs [oui, il y a des choses qu'on ne peut expliquer que par une jalousie évidente].

"En effet, je voulais vous dire que je vais donc partir ... ce ne peut être qu'une surprise relative puisque j'avais déjà depuis longtemps exprimé des envies autres. Je vais donc rejoindre celle qui a autorité sur notre direction afin d'en piloter l'activté au travers d'autres travaux que ceux qui m'occupent aujourd'hui. J'ai beaucoup aimé certains aspects de ceux-ci, d'autres moins mais là aussi, je n'en ai jamais fait mystère. L'avantage pour certaines, c'est qu'elles continueront à se frotter à l'affreux individu que je suis. J'ai la mission de donner un peu d'air frais là où je vais arriver ... ne soyez pas déçues, je serai tout autant insupportable avec les robes qui ne riment à rien ou les coiffures attentatoires aux bonnes moeurs." ...

Ça a laissé un grand silence ... j'ai donc pris mon plus beau sourire et voilà. Tout le monde est reparti un peu sonné. Moi, depuis, je suis un peu regardé avec une évidente défiance. Du coup, je donne le change en rigolant beaucoup. Bah oui, c'est toujours comme ça : j'ai en ce moment ce sentiment d'invincibilité lié au fait que je maîtrise mon avenir en m'étant affranchi des diktats décidés contre moi. Les plans sur la comète qu'on avait fait pour moi, les ambitions que j'avais ont toutes été contrariées avec méthode et pourtant, en fin stratège, j'ai réussi à m'extirper de tout ça. Une amie m'a confié qu'on ne se méfiait pas assez de mes calculs : "Ils ont toujours tort au même endroit : ils n'ont pas compris à quel point tu es un vrai malin".

Oui ça fait plaisir ... vraiment, totalement !

Tto, qui a annoncé son départ