Dans quelques semaines, ton serviteur va tourner une page de son histoire. J'ai décidé il y a quelques jours que j'allais faire le choix, celui d'être acteur du changement plutôt que de le subir. Dans quelques semaines, je vais changer de bureau, changer de fonction, changer de métier mais pas changer d'employeur. Je vais devenir officiellement l'adjoint du N+2 de ma chef, je vais être chargé de l'exécution budgétaire de priorités que j'ai partiellement déterminées depuis quelques mois, je vais avoir la charge de gérer des informations super confidentielles qui tiennent aux dirigeants de la Compagnie chérie, je vais passer de la lettre aux chiffres ... prenant un peu de large par rapport au métier que je pratique depuis bientôt vingt ans.

Dis comme ça, ça serait presqu'angoissant. Pourtant, je suis intimement persuadé qu'il est parfaitement temps que je quitte mes fonctions actuelles. Ce n'est pas qu'elles ne m'intéressent pas en partie [je gère des situations inextricables, de l'égo à tous les étages et des contraintes réglementaires vis à vis desquelles je n'ai pas les moyens de pouvoir renoncer], c'est simplement que j'en ai fait le tour. Je rappelle que je suis arrivé à l'endroit où je me trouve encore en juin 2013 alors que je n'avais rien demandé et que l'on m'a intimé l'ordre de me soustraire sinon je pouvais aller voir ailleurs. J'ai composé avec l'incomfort, avec la matière qui ne m'intéresse pas, avec les susceptibilités de pintades pêtries d'une suffisance qui fait un peu de peine. J'ai fait le dos rond et ceux qui ont eu le douloureux plaisir de voir à quel point je le vivais bien savent parfaitement le degré de sacrifices qu'il m'a fallu consacrer à tout cela. Nonobstant, j'ai fait mon travail malgré les procès d'intention, malgré les pièges, malgré les calomnies, malgré les circonstances dont on ne m'a fait aucune grâce. J'ai toujours répondu présent, j'ai toujours respecté tous les délais qui m'étaient imposés, j'ai surtout donné de la satisfaction à celles et ceux qui venaient me voir pour trouver une solution à leur problème. J'ai aussi sorti de l'ornière une assistante et eu le courage de prendre les décisions qui s'imposaient vis à vis d'une autre, sans avoir peur de mon ombre.

"Tto, je voulais te voir parce que j'ai une question personnelle à te poser : est-ce que tu accepterais de venir travailler avec moi, directement ?" me lança celle avec laquelle je travaillerai bientôt. Si j'ai hésité, c'est parce que dans le même temps, on m'a proposé d'être la plume du Président, celui qui devait écrire ce qu'il paraissait si aisé pour lui de dire. Oui, j'ai hésité parce qu'écrire est une seconde nature pour moi, parce que l'ombre me plait beaucoup mais j'ai aussi hésité parce que j'ai considéré qu'il n'y avait pas le coup d'après. J'ai toujours pris mes décisions ainsi : ne jamais s'enfermer, et donc toujours prévoir le coup d'après ... celui qui permettra de rebondir. En étant la plume du Président, je ne pouvais plus que me recaser dans un ministère ou au service d'un homme politique. En choisissant ce que j'ai choisi, j'ouvre la possibilité de la dernière évolution de ma carrière, celle qui devrait me propulser vers l'étape finale.

Au gré du temps, j'ai passionnément compléter le kaléidoscope de ce que j'ai à vendre : au fur et à mesure, en fonction des printemps qui s'écoulent, j'ai solidifié les acquis en ouvrant l'éventail. Là, j'ai l'occasion d'ajouter la pièce financière au puzzle. Ce ne sera pas facile, ce sera même assez inconfortable au début je pense mais j'ai besoin de casser la routine d'un poste dans lequel je m'ennuie. Et puis, je serai en surplomb des équipes que je vais laisser ... avec la possibilité d'y revenir un jour si nécessité fait loi.

J'avais dit que 2019 serait une année de changements. Ma N+1 n'a probablement pas imaginé à quel point ce genre de paroles prophétiques sont toujorus suivies d'effet quand je les prononce. Elle goûtera ainsi au nectar de ne m'avoir pas assez écouté. Je vais prendre de la hauteur, j'ai besoin de changer d'air et de ménager pendant quelques années la piste de lancement de l'étape suivante. En plus, voilà bien longtemps que l'on n'est pas venu me chercher pour me dire qu'on avait envie de travailler avec moi. Pour l'estime de soi, ça fait un bien fou ... d'autant plus quand on m'annonce que, bien entendu, je deviendrai cadre de direction l'année prochaine quand j'aurai fait mes preuves.

Il faut toujours savoir attendre le bon moment pour saisir les opportunités qui se présentent. Je suis un opportuniste qui n'a aucunement honte de l'être. J'ai fait un choix important, Zolimari m'ayant confié qu'il était fier de moi parce qu'il mesure tout le délice que je peux ressentir de me voir proposer quelque chose qui est à la hauteur de la reconnaissance que j'attends. Sans lui, rien n'aurait été possible non plus.

Tto, en évolution