La crise de la quarantaine
J'ignore si l'âge y est pour quelque chose, le fait qu'en avançant c'est chaque fois un peu plus violent.
Depuis maintenant une quinzaine de jours, j'ai fait le choix de me mettre en quarantaine, de m'isoler de celles et ceux pour lesquels je n'ai plus la force de faire semblant. Plutôt qu'être désagréable ouvertement [ce que je sais faire], je me mets en retrait choisissant les destinataires de mes messages et de mes attentions. On pourra voir là un signe de dépression qui coincide toujours avec le début de l'automne ou je ne sais quelle autre explication toujours plus imparfaite tant il est difficile de comprendre ce que j'ai dans la tête. Le fait est que la saturation dont j'évoquais le poids ici ne s'est que partiellement amoindrie. Ce n'est finalement pas bon signe parce que cela veut dire que j'ai été plus profondément blessé que je ne l'avais envisagé au départ.
Oh bien sur, il faut savoir tout relativiser et "prendre du recul" comme le disent ceux qui démontrent au quotidien qu'ils en sont incapables quand quelque chose les touche [j'ai déjà dit que ça me pétait les couilles qu'on me donne des conseils quand on est incapable de les suivre ?]. Oh naturellement, il faut savoir prioriser et quand on affronte des tempêtes tous les jours pendant plus de onze heures d'affilée, ce n'est pas si facile. Oh clairement, il faudrait réduire les sollicitations consistant à sortir tous les soirs pour éviter d'être un légume le vendredi et d'être malade tous les wikendes. Oh oui ... mais voilà, ma vie n'est pas celle-là et, sans en avoir choisi tous les tenants et aboutissants, elle est faite de ce qui la compose et qui, en ce moment, me décompose.
Donc oui, cela rend la superficialité de certaines relations, que je pensais plus profondes et authentiques, assez pénible. Cela me fait jeter un oeil désabusé sur les chantages affectifs de tous ordres qui me sont réservés, y compris quand il s'agit de ma Môman qui ne se rend pas compte des ravages. Cela m'oppresse de me dire que ce que je peux dire à Zolimari n'a finalement que peu de valeur quand cela ne va pas dans son sens [je crois avoir compté qu'il m'a posé neuf fois la même question, quasiment à l'identique, parce que ma réponse initiale ne lui convenait pas]. Cela m'atteint quand j'observe que mon corps s'exprime au travers de douleurs, maux de tête, rhumes et autres joyeusetés du genre ... chaque jour il essaye de me faire comprendre que la saturation est immense.
Ce faisant, je suis redevnu sanguin et mes colères emportent tout sur leur passage. Un désabonnement à un journal qui n'a pas été pris en compte, et hop je suis en transe pendant plus d'une heure. Une carte bancaire qui n'arrive pas [en fait si, elle était arrivée mais fut enfouie dans le courrier de Zolimari qui ne fait son courrier qu'un fois par trimestre quand tout va bien] et je relègue Tchernobyl pour un feu d'artifice de village du Cantal. Etre mis devant le fait accompli du fait qu'on va encore passer une soirée pourrie où il faudra attendre qu'il rentre à 20h40, qu'il allume la télé et qu'on bouffe ce que l'on peut comme des zombies, et je me mure dans le silence toute la soirée parce que je n'ai plus de force pour redire pour la millième fois peut-être que j'attends un peu autre chose qu'un chapelet de pénibilités à devoir affronter tout le temps. Mais ça ...
Alors oui, je m'isole. Je réponds ponctuellement à quelques demandes ici et là, en fonction de mes envies. Le reste, je ne gère plus en direct, cela ne sert plus à rien.
Ce qui m'inquiète, c'est probablement que la quarantaine va confiner au purgatoire pour pas mal de gens, tu sais ce purgatoire dans lequel je place ceux à qui j'offre une dernière chance avant de les vider et de continuer ma vie sans eux, les laissant là où ils sont et me désintéressant totalement d'eux. C'est froid, c'est définitf et irratrapable et ceux qui se sentent protégés du fait qu'ils pourraient y échapper ont bien tort mais ils rejoindront leurs semblables qui pensaient la même chose et qui n'existent plus pour moi. D'ailleurs, à l'occasion de ma prochaine absence, je m'étais mis dans la tête de faire une série de portraits de ces fameuses ruptures qui jalonnent ma vie. J'hésite encore ...
Je créé mon isolement, pour me protéger et aussi protéger les autres. Je mobilise des ressources énormes pour m'infliger certains trucs et j'en ressors vidé. En dépit des apparences et pour certains problèmes, je suis incroyablement seul. Je n'écris pas cela pour susciter une empathie que je suis incapable de gérer aujourd'hui, pour apitoyer sur mon sort ou réclamer indirectement quoi que ce soit. J'écris seulement ce que je ressens, ce que j'ai ressenti mardi matin, blotti contre la fenêtre du train en regardant défiler le paysage ubrain que je traversais ... en me disant que je serais probablement bien mieux ailleurs, allégé de quelques tracasseries.
Le quadra est en quarantaine et il va y rester encore un moment parce qu'il en a besoin, de toute évidence.
Tto, fatigué