Lorsque sonna le téléphone en ce samedi matin, j'étais avachi sur mon canapé, presque prêt à me sustenter. Au même moment, ma Môman m'appelait sur mon téléphone portable. Curieuse coïncidence ... et comme cela arrive parfois, mon intuition m'a poussé à décrocher le téléphone alors que le numéro m'était inconnu.

"Oui allo Tto ? Bonjour, c'est le Père Jacques ... " entendis-je au travers d'une voix fatiguée, essoufflée mais dont le ton conservait chez moi une empreinte indélébile.

Le Père Jacques ... l'homme qui a sauvé ma vie ! Celui sans lequel je ne serai pas là aujourd'hui répondait ainsi à mon courrier, envoyé quelques jours auparavant. Il faut croire que malgré toutes les distances de quelque nature qu'elles soient, il est des liens indéfectibles qui unissent les hommes. Je lui avais écrit après m'être marié pour lui dire que cette union était arrivée grâce à lui et que je ne voulais pas qu'il ne sache pas combien je lui en étais reconnaissant. Oui, j'attache une importance particulière à exprimer ma gratitude à celles et ceux dont la présence et l'action sont fondamentales à mes yeux.

Je me souviens avoir entamé mon courrier en lui expliquant que je ne savais pas, pour une fois, comment exprimer ce que je ressentais pour lui. Et puis, j'ai collé un billet écrit ici et ici dans lequel il m'avait dit un soir, dans un bar du XIXème arrondissement, que j'étais un garçon bien. C'est curieux mais peu de gens m'ont fait ce compliment ...

- J'ai reçu ta lettre qui m'a fait énormément plaisir tu sais ...
- Je vous en prie. C'était normal de vous dire ce que j'avais à vous dire et j'ai préféré l'écrire. Les écrits restent.
- Oh tu sais, je suis au terme de ma vie. J'ai hâte que le Seigneur me rappelle maintenant ...
- Ah ... 
- Je pense que j'ai fait tout ce que j'avais à faire tu ne crois pas ?
- Oui euh je ne sais pas. L'essentiel est que vous ayez le sentiment de la mission accomplie. Pour ce qui est de moi, je vous ai écrit ce que j'en pensais.
- J'ai beaucoup prié pour toi
- Merci infiniment
- Tu vois, toi et ton mari, je vous souhaite le meilleur et je vais continuer à prier pour vous deux. Il faut y croire.
- C'est très gentil.

Deux minutes après que nous ayons entamé notre échange, il a pris congé de moi.
C'est curieux cette sensation ... cette sensation de se dire que c'était la dernière fois que je lui parlais tant il aspire à se retirer définitivement. C'est bouleversant même de se dire qu'on vient de parler une dernière fois à celui qui a tant d'importance. Oui, j'ai pleuré et abondamment ... c'est terrible de se dire que ça y est, plus jamais je ne l'entendrai. Il a terminé par ces paroles que je n'oublierai jamais : "Où que je sois, je continuerai à prier pour toi. Je t'embrasse".

Voilà ... j'ai été dévasté pour un moment mais ce sont aussi ces moments uniques qui font de ma vie ce parcours singulier que je ne renierai jamais, ce d'autant que j'y croise des personnes extraordinaires comme lui.

Tto, tellement reconnaissant