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une vie de tto
3 octobre 2016

La bouteille à la mer : la main tendue

La bouteille à la mer

Précédemment dans "la bouteille à la mer"

Après avoir envoyé ces messages anodins mais lourds d'un contexte que j'avais décidé de briser, j'ai expliqué à Zolimari le pourquoi du comment ... Cette cousine sortie de nulle part dont les connaissances légendaires de la vie parisienne faisaient rêver, sa fille dont il s'étonna que nous ne nous soyons pas revus depuis tant de temps et je lui ai enfin expliqué ce dénominateur commun : ma tante, cette femme au destin incroyable. tout y était : la féerie, l'aventure, les grands hommes, les circonstances historiques, le lustre, la descente aux enfers et cette relation si particulière avec moi.

Je la fascinais, elle m'impressionnait. "N'oublie jamais que tu es le plus diplômé de cette famille Tto", me disait-elle, "comme ta mère dans sa génération !". Elle me considérait de façon particulière, j'avais pour elle toute la patience du monde parce que j'aimais l'écouter me raconter ces histoires de famille qu'elle seule pouvait encore narrer avec force de détails, petites vacheries au coin, infos capitales en guise de vernis. Nous avons beaucoup parlé, nous nous sommes racontés plein de choses, j'adorais lui demander de m'expliquer la complexité de cet arbre généalogique pour qu'elle recommence à me parler de sa grand mère, mon arrière grand mère, cette teigne qu'elle retrouvait dans certaines de ses soeurs, ce caractère fort qui menait les hommes à la baguette au début du XXème siècle, cette force de caractère qui avait cru nécessaire par fierté de refuser un héritage colossal en francs or qui ferait aujourd'hui que je serais propriétaire de plusieurs appartements à New-York notamment. Oui j'aimais la faire parler des ragots que le tout-Paris chariait, elle qui traînait dans des dîners mondains où les laquais du pouvoir aimaient débiner Mitterrand et ses favoris. Couturière des grands et décoratrice d'intérieur de celle qui sera première dame de France, elle aimait croire qu'elle appartenait encore à un monde que son mari lui avait ouvert et qui s'était refermé implacablement après son décès brutal en 1980. Il fallait être du cercle et lui avait un glorieux passé de résistant qui pouvait servir, elle était moins légitime. Ce soir là, j'ai beaucoup raconté à Zolimari tout cela et j'ai vu dans ses yeux une incrédulité tant ce que je lui racontais pouvait sembler inventé. Pourtant non, tout était vrai.

Mes messages envoyés, le secret espoir d'une réponse rapide déjà en train de me ronger, nos vacances se sont poursuivies et la nuit fut très bonne.

Les réponses ne vinrent pas. Je n'ai parlé à personne de cette tentative, pas vraiment fier de n'avoir pas su susciter l'envie que l'on vienne me parler, pas trop envie non plus qu'on vienne me dire que je n'aurais pas dû, qu'il n'aurait pas fallu, que cela ne servait pas à grand chose quand même ... bref, les histoires de famille sont toujours des boulets que tu traînes et qui s'alourdissent à mesure que tu essayes précisément de les alléger. J'ai donc remisé sur le côté cette bouteille à la mer, envoyée un soir de vacances en Croatie. Ces deux bouteilles à la mer en réalité ...

Les semaines ont passé, les mois aussi, les années même ...
Au fil du temps, l'espoir d'un retour diminue comme la flamme de la bougie qui s'étouffe dans la cire de la bougie agonisante ... jusqu'à n'être plus grand chose.

Pourtant, il n'est pas question de regret. Honnêtement, j'ai peu repensé à cela. C'est même normal et logique me connaissant : j'avais pesé le pour et le contre, je m'étais décidé assez vite sans trop me mettre de pression, j'avais choisi une tonalité de message assez simple et décomplexée, faisant fi de tout ce qui aurait pu bloquer la reprise de contact. Fataliste, je devais forcément m'être dit que si cela ne l'avait pas fait, tant pis ... nos vies étaient désormais trop éloignées, trop différentes, les impressions d'un temps encore trop tenaces au point de ne pas pouvoir passer outre. Et puis bon, très clairement, j'ai tendu la main et je n'en veux à personne de ne pas la saisir mais il ne faut pas espérer de moi que j'attende. Je suis un homme pressé, qui vit dans l'urgence de n'avoir pas de temps à perdre parce qu'il a compris depuis trop longtemps que la vie est courte. Je fais un chemin parfois tortueux et quand j'adresse un signe, soit on le saisit et chacun profite de circonstances désormais plus favorables, soit on se loupe et chacun continue sa vie.

Deux ans et dix neuf jours plus tard, un matin ... je regarde mes mails alors que je suis en Islande et que mes vacances ont commencé depuis une petite semaine. Et là ...

Bonjour Tto! Je découvre ton message...2ans plus tard!!!Il était tombé dans la catégorie" messages filtrès"...un peu comme une boite SPAM...là où on ne regarde jamais! Je ne sais pas si tu auras ce message...Je vis à Pondichéry, en Inde du Sud. Je suis remariée et j'ai 5enfants...Et toi? Habites tu toujours Paris? Comment vas ta vie? Et tu marié? As tu des enfants? J'espère avoir de tes nouvelles...le temps passe si vite! J'ai eu 40ans cette année! Des bisous! A bientôt! 

To be continued

La bouteille à la mer
LUNDI PROCHAIN : Nouvel épisode de "la Bouteille à la mer"

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Commentaires
E
Comme quoi, il faut toujours faire les choses que l'on sent ....
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