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une vie de tto
15 octobre 2015

La loose-zelot

2015 - REQUISITOIRE

Il est des billets que je ponds assez rapidement et d'autres que je garde au chaud, avec la ferme envie de les ressortir exactement au moment propice, quand il le faut, parce que c'est le moment opportun. Aujourd'hui, c'est le réquisitoire de Pascal Houzelot.

Mais qui est Pascal Houzelot me demanderas-tu ? Pascal Houzelot est un nom qui traîne depuis des années dans le monde médiatique, toujours en périphérie des intrigues et réseaux indispensables qu'il faut avoir pour en être, rarement sur le devant de la scène sauf depuis 2004 quand il a lancé Pink.TV puis Numéro 23. Pascal Houzelot dispose depuis des années d'un carnet d'adresses incroyable sur la place de Paris lorsqu'il s'agit des médias. Après avoir fait beaucoup de lobbying pour Etienne Mougeotte lorsqu'il était à TF1 [et on se souvient de l'éfficacité du lobbying de TF1 dans les années 80 et 90], Houzeolot a voulu se lancer dans la production cinématographique : c'est à lui que tu dois le fameux "Absolument fabuleux" [désastre monumental] mais aussi "Le libertin", "Dans tes rêves", "Nouvelle chance" ou encore la nouvelle adpatation du "Grand Meaulnes" de 2006, autant dire des succès très modestes qui n'ont pas vraiment permis de marquer l'industrie du cinéma.

Pascal Houzelot est un intrigant parce qu'il a le nez pour faire des coups. Ses dîners organisés chez lui où il brasse tout ce qui se fait de mieux lui donnent un accès privilégié à divers cercles, et donc une avance sur d'autres ce qui lui permet d'anticiper énormément de choses. C'est aussi l'occasion de cimenter un réseau qui lui permet de connaître tous ceux qui font la télé, la radio et la presse. Il les connaît quasiment tous, personnellement. C'est ainsi qu'il réussit à monter un tour de table impressionnant pour Pink.TV qui va de TF1, M6, CANAL+ à Lagardère [d'ordinaire rivaux]. Il sait faire claquer l'image en inaugurant la chaîne au Palais de Chaillot avec plus de 2.500 invités ... en envoyant même une bouteille de champagne à tous ceux qui n'ont pu honorer l'invitation qui leur aurait permis d'apprécier les félicitations et encouragements d'Elton John lui-même !

Houzelot Numéro 23

Oui mais voilà, Pink.TV périclite rapidement et est transformée trois ans après son lancement en robinet à films pornographiques gays sur 5 heures quotidiennes ... TF1 et M6 quittent le navire, Houzelot négocie qu'elles effacent discrètement les dettes de 15 millions d'euros. On murmure que Pink.TV serait à l'équilibre, rien ne le démontre puisque la chaîne ne publie pas ses comptes. C'est en 2012 que Houzelot revient à la surface en flairant la bonne opportunité : le CSA et le gouvernement sont à fond sur la diversité, parangon sociétal cosmétique qui était censé créer du lien. Houzelot décide de proposer sa candidature à une fréquence TNT pour proposer la chaîne de la diversité ! "Nous allons sur-traiter les sujets sous-traités par les grandes chaînes" annonce le sémillant PDG de la future Numéro 23, devant les yeux médusés de certains sages qui n'ont toujours pas compris ce que devait être un feuilleton diversité par rapport à un feuilleton pas diversité. Bref, le coup marketing fonctionne à merveille et Pascal Houzelot lance Numéro 23 en 2012 avec de prestigieux partenaires financiers comme LVMH, CASINO, FREE, VENTE-PRIVEE.COM ... Oui mais voilà, les promesses n'engagent que ceux qui les croient. Trois ans plus tard, la chaîne multi-diffuse les émissions de tatouage et les talent-shows américains comme "X-FACTOR" ... La grille de programmes est tellement étincelante que les dents grincent.

Sauf que Pascal Houzelot est un homme de coup ... et le compte de gestion prévisionnel jusqu'en 2019 qu'il avait présenté lors de son audition au CSA n'était qu'un leurre. Passé la durée incompressible de deux années pendant laquelle toute revente de la chaîne était impossible, il annonce cet été avoir noué de sérieuses discussions avec Alain Weill [BFM-TV, RMC] pour que le second rachète la chaîne du premier moyennant un gros chèque de 90 millions d'euros. Pour une chaîne moribonde qui cumule les pertes et dont les programmes n'ont rien à voir avec la promesse, ça commence à faire grincer des dents.

C'est alors qu'au coeur de l'été, on découvre que Pascal Houzelot a oublié de dire beaucoup de choses ... Outre le fait qu'il soit choquant de revendre quelque chose que l'Etat a concédé gratuitement et faire ainsi une jolie plus-value [Houzelot déclare avoir dépensé 50 millions depuis l'ouverture de la chaîne, il lui resterait encore 40 millions ...], on découvre qu'un investisseur russe est entré au capital à un seuil qui aurait du être déclaré au CSA. Et comme cela ne suffisait pas, on découvre qu'un pacte d'actionnaire a été noué avec ledit investisseur, le pacte prévoyant une revente de la chaîne à horizon 2015/2016. Là, ça commence à être tellement trop que le CSA, si placide et compréhensif d'ordinaire, convoque le patron de Numéro 23 pour une audition.

L'audition ayant eu lieu en début de semaine [un vrai carnage selon les observateurs], le CSA a rendu sa décision au sujet du projet de rachat de Numéro 23. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que la décision est historique. C'est non seulement non, mais c'est surtout un retrait de l'autorisation d'émettre ! En gros, Houzelot ne peut pas vendre mais surtout, il va fermer sa chaîne. Le 30 juin 2016, Numéro 23 cessera de diffuser des émissions de tatouage notamment. C'est historique parce que c'est la première fois en France que l'autorité de contrôle des médias retire une autorisation d'émettre. C'est toute la chaîne qui dégringole et qui ne vaut plus rien, donc ne peut plus être vendue.
Le coup est rude pour l'intrigant qui paye cash ses oublis, ses turpitudes d'avoir présenté un compte de gestion prévisionnel à sept ans dont il savait qu'il était fictif puisqu'il allait vendre au bout de deux ans.

Surtout, cela permet au CSA de remettre sur le marché une fréquence qui va aguiser les appétits des TF1, CANAL+, M6 et Lagardère qui n'auront pas besoin de débourser des millions puisqu'elle sera gratuite. Cela met un terme aussi au trafic de fréquences qui a permis à Bolloré d'empocher 465 millions pour Direct8 et Direct Star, après que le Groupe AB ait revendu TMC et NT1 à TF1. Le magot consistant à se voir attribuer une fréquence gratuitement pour la revendre des millions ensuite devenait assez scandaleux. C'est Houzelot qui trinque et c'est finalement bien fait pour lui parce qu'à vouloir jouer sur tous les tableaux, on finit par ne pas nécessairement s'attirer que des faveurs d'un monde de carnassiers qu'il connaît pourtant si bien. Personne ne regrettera Numéro 23, Houzelot fera un recours pour essayer de suspendre la fin de l'autorisation d'émission ... la chaîne est morte, Houzelot aura perdu plus de 50 millions dans l'histoire et pour un intrigant lobbysite au carnet d'adresse le plus reluisant de Paris, le coup est rude. Qu'importe, Pascal Houzelot [qui ne se déplace qu'en voiture avec chauffeur] est un homme de coups ... parfois, il arrive qu'ils soient mauvais.

Tto, ravi

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