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une vie de tto
7 août 2015

Les Guignols de l'esprit Canal

2014 - REQUISITOIRE

Dans le pays de l'indignation facile et sur jouée, il est des causes qui méritent que l'on vocifère à s'en rompre les cordes vocales. Ah oui, des vrais combats qui justifient que l'on en appelle aux grands principes, aux grandes heures des combats historiques ou que sais-je encore ... le catalogue des rhéteurs de circonstances qui sont toujours là pour donner des leçons de démocratie aux crétins de la masse qu'ils se targuent de défendre ne manquent jamais d'imagination et s'arrangent avec quelques sources ou faits pour ripoliner comme il faut leurs argumentaires fracassants.

Voilà le problème inouï que la libération de la parole produit aujourd'hui : tout le monde se pense autorisé à être le meilleur démocrate de France, quand il y a quelques années on n'avait seulement 30 millions de sélectionneurs de l'Equipe de France [ça m'en touchait une sans faire bouger l'autre tant le football est un sujet secondaire consistant seulement à abrutir les masses]. L'été meurtrier à CANAL+ était donc l'estrade sur laquelle il fallait monter, j'en ai vu faire l'ascension et je pense avoir vu tout le monde en tomber. Pas étonnant, un tel sujet mâtiné de liberté d'expression justifie, au moins, de s'y connaître un peu pour éviter de se prendre quelques boomerangs.

Réquisitoire Guignols

Ainsi donc, on aurait du être tous "Guignols" comme on a tous été "Charlie" en janvier, au motif que le ténébreux Vincent Bolloré aurait eu l'outrecuidance de demander que l'on déplaça "Les guignols de l'info" au regard des performances économiques du programme [l'un des plus chers à la minute du paysage audiovisuel]. Certes, une arrière-pensée politique existe probablement mais la capacité des Guignols a être des faiseurs d'opinion comme en 1995 est largement éventée et n'existe plus guère que dans les couloirs de CANAL+ où certains y croient encore. Combien de ceux qui ont invoqué les principes républicains à cette occasion regardent encore les marionnettes en latex qui ne sont, objectivement, plus drôles depuis des années ? Qui peut expliquer ce qu'il y a encore de corrosif dans ce programme court ? Qui peut nier que la perte de qualité à tous les niveaux est flagrante ? ... Et surtout, qui peut disputer à Vincent Bolloré, actionnaire de CANAL+, le droit de vouloir peser sur le devenir d'une société commerciale dans laquelle il a investi ? Fin de l'acte I, "Les Guignols" sont sauvés mais émigrent en crypté tous les soirs à 20h50, ce qui renforcera leur marginalisation.

Acte II, Bolloré vire Rodolphe Belmer [nous en avons déjà parlé] et les professionnels de la profession s'inquiètent de ces mouvements chez le principal bailleur de fonds du cinéma français. Les perfusés se demandent si le nouveau chef de service ne va pas être plus regardant ... Cruel déconvenue pour ceux qui râlaient déjà il y a quelques années sur le comportement de CANAL+ ... Au moins, ils auront de quoi s'offusquer désormais et mettre en avant la sacro-sainte liberté de création [dont j'ignorais que c'était un droit fondamental].

Acte III, Bolloré a censuré un documentaire d'investigation sur le CRÉDIT MUTUEL au motif que le patron de la banque considérée est un de ses amis et que le reportage fait apparaître que l'éthique n'est pas impeccable chez le mutualiste. Et là, c'est le tsunami ... les cris d'orfraies, les cornes de brume et tout l'attirail classique sont de sortie, les gauchistes hurlent au complot financier de droite de cet infamie capitaliste. et vous reprendrez bien un peu de liberté d'expression que l'on bâillonne désormais. Et qui est ce Bolloré pour pulvériser le sacro-saint "Esprit CANAL" et les rentes qui vont avec ? Voilà voilà ...

Sauf qu'il faudra rappeler à tout le monde que Vincent Bolloré, pour lequel je n'ai pas une affection particulière, est un actionnaire et en qualité d'actionnaire, il dispose de droits qu'il n'a pas outre-passés. Certes, il se comporte différemment de ses prédécesseurs [en apparence au moins] mais je ne vois rien de nouveau au fait que l'actionnaire d'une chaîne de télévision demande à une rédaction de ne pas trop insister sur un sujet qui le dérange.
Et c'est là que les moutons de panurge m'exaspèrent. CANAL+ serait le sanctuaire de la liberté d'expression. On croît rêver ...

Rien n'est plus conformiste que CANAL+, rien n'est plus normatif que la chaîne cryptée du foot et du porno. La force de la chaîne a toujours été de faire croire, avec renfort de marketing, qu'elle faisait une télévision différente. Évidemment, son statut de chaîne cryptée devait l'absoudre de la contrainte de l'audience comme TF1, LA CINQ ou M6 au départ. Il n'en demeure pas moins vrai que cela reste une société commerciale qui doit vendre des abonnements. Pour renflouer des caisses exsangues, André Rousselet obtint auprès de son ami François Mitterrand [dont il sera exécuteur testamentaire par la suite] le droit de faire de la publicité sur des plages en clair. Et c'est à raison du financement de ces plages en clair dont l'audience dévisse depuis trois ans que Vincent Bolloré demande aujourd'hui que l'on ne paye pas trop cher des émissions facturées trois fois le prix de la concurrence pour une audience moindre.

L'esprit CANAL n'existe pas, n'a jamais existé et CANAL+ a toujours fait de la télévision commerciale avec les mêmes recettes que TF1, Berlusconi ou RTL [propriétaire initial de M6] : des filles aux seins nus, de la vulgarité subtilement dosée pour paraître provocation, des paillettes et du show. Le marketing a aidé à distinguer le gras et le populacier à la sauce TF1 ou LA CINQ du branché version CANAL+. Cependant, au fur et à mesure des années, les excursions de la chaîne à Cannes ressemblent diablement à un "Intervilles" du cinéma, les vachettes en moins. Où est donc la différence ? Le traitement exigeant de sujets dont personne ne parle ? Ceux qui profèrent de telles énormités oublient facilement la liste noire de sujets dont il ne fallait pas parler au début de la chaîne à raison de la proximité de Rousselet avec le Président de la République. Est-ce CANAL+ qui parla la première des amitiés vichystes ? Non, LA CINQ. Est-ce CANAL+ qui s'interrogea la première sur le financement du PS dans les années 90 ? Non, la presse écrite.

Et quand Rousselet fut débarqué et remplacé par un Lescure intronisé valet de Jean-Marie Messier, a-t-on vu une enquête de CANAL+ ou un reportage de sa chaîne d'info nouvelle créée I>TELE sur le scandale des facturation de la Compagnie Générale des Eaux ? Et pour cause non, c'était l'actionnaire de CANAL+ ! Se rappelle-t-on de la façon dont l'explosion de Vivendi fut traitée par les rédactions de CANAL+ ? Et ceux qui hurlent contre la censure de Bolloré aujourd'hui, que ne les a-t-on pas entendu en 2002 !! Ceux qui brandissent leurs résiliations d'abonnement ne trouvent-ils pas étrange d'avoir accepté tout cela depuis si longtemps ?

Les postures sont tellement grossières qu'elles feraient passer Vincent Lagaf' pour un acteur exceptionnel digne de Louis Jouvet ! Bolloré ne fait rien de plus que les autres. Je ne dis pas que c'est légitime pour autant ni souhaitable mais la liberté d'expression en télévision, en radio ou en presse n'existe pas et ceux qui l'invoquent sont vraiment des guignols tristement navrants. Ce que la France refuse d'accepter, c'est précisément ce parti pris de chaque organe de communication à l'instar de ce qui est admis pour la Presse. Qui peut décemment considérer que l'information est objective sur BFM TV, Europe 1, France 2, France Inter, TF1 ou encore RTL ? Et c'est normal voir logique puisque le journaliste objectif n'existe pas [en dépit de ce que Patrick Cohen et ses loustics de France Inter essayent de faire accroire]. Je préfère mille fois une interview politique de Jean-Pierre Elkabbach dont je connais le parti pris que celle d'un Thomas Legrand qui clame haut et fort qu'il est indépendant ! Pour CANAL+, c'est pareil ... la liberté d'expression et l'absence de parti pris n'a jamais existé. Comment diable l'invoquer dès lors ? Et comment Bolloré pourrait-il détruire ce qui n'a jamais existé ?

Même sur M6, les sujets des magazines sont filtrés selon qu'ils pourraient ou non déplaire à un gros annonceur de la chaîne. Et là, qui monte sur l'estrade pour expliquer que la démocratie est en danger ? Toutes les chaînes de télévision font la même chose et les gauchistes de circonstance vont mine de l'oublier pour se payer un sale patron de droite qui est ami avec Sarkozy. La turpitude et la posture sont là : prendre des idéaux factices pour taper sur le cercle sarkozyste. 

De vrais guignols en somme ...

Tto, nulle part ailleurs

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