Avant de commencer, je dois le dire : aujourd'hui sera un entorse sévère à la ligne éditoriale de cet endroit qui exige que le contenu proposé soit grand public et réservé à une audience familiale la plus élargie. Oui, aujourd'hui, on s'en bat les c... euh, on s'en tamponne le coquillart à telle enseigne que je dégaine l'avertissement qui va bien pour ne pas avoir de problèmes.

Alors bon, on va y aller direct puisque ce fut direct.

On était trois, un soir où il ne faisait pas si chaud que cela. Celui, à la grâce duquel j'en étais arrivé là ce soir là, me regardait avec l'oeil amusé de celui qui sait dans quel univers j'allais pénétrer, ce qui allait s'introduire en moi et dans ma vie. La promesse sur la papier était claire : un bambou magique dans ta bouche !

Depuis le temps qu'on m'en parlait, depuis le temps que j'en parlais, depuis ... c'est toujours ça le problème, attendre trop longtemps amène à envisager des choses disproportionnées par rapport à la réalité, d'où, parfois, un peu de déception. Là, j'avais eu le temps d'y penser et pourtant, ma curiosité n'avait pas trop joué des siennes, j'étais même assez détendu comme il faut pouvoir l'être en de pareilles occasions. Oh certes, toute ma vie n'allait pas changer, il n'y aurait pas nécessairement un avant et un après [gardons ce genre de formules pour d'autres occasions plus ... plus importantes dirons-nous]. Mais voilà ... vers 20h30 ce soir là, j'avais compris que nous touchions notamment au but de mettre pour la première fois un bambou magique dans ma bouche qui ne demandait que cela.

Oui parce que l'attente [que j'essaye présentement de traduire] avait fait en sorte que le désir avait remplacé la curiosité. Il n'y avait même plus d'appréhension. Déjà que je ne suis pas forcément sujet à cela, mais là c'était clair j'en avais envie. et l'oeil amusé du garçon qui me faisait face ne faisant qu'exacerber la tentation, ne faisait que renforcer ma détermination. Quant à savoir si texture ou les sensations me plairaient, c'était secondaire.

Il fallut attendre un peu ... ces choses là se travaillent un peu. Je laissais faire avec une distance telle qu'elle permettait de renforcer la surprise. En effet, je voulais que le contact avec le bambou magique soit direct et sans possibilité de s'apprivoiser visuellement avant. Un truc direct mais pas sans blabla, j'ai toujours considéré que c'était trop désincarné pour moi et là, en l'occurrence, il fallait que ce fut incarné sinon autant prendre n'importe quelle tige en plastique et imaginer. Non là, on m'avait promis des sensations, du vrai et du chaud, je voulais tout cela.

Lorsqu'on m'annonça que c'était bon, ... j'ai presque reculé, comme s'il s'agissait d'un dernier sursaut devant l'inconnu. Oui parce que finalement, c'est un peu bizarre d'aller se faire un premier bambou magique avec quelqu'un qu'on ne connaît pas tant que cela en définitive, et surtout quelqu'un que l'on n'avait jamais rencontré quelques dizaines de minutes avant. Mais voila, cela fait aussi partie du charme de l'instant, cette plongée sensationnelle au sens premier du mot ...

Il se présenta devant, ouvert comme il le fallait ... "Attention, c'est chaud" entendis-je ... Les yeux grands ouverts comme pour n'en perdre aucune goutte, je m'approchais, je tendais un peu la langue, j'arrondissais mes lèvres comme pour aider, pour faire en sorte que le premier contact soit le plus voluptueux possible.
Une fois entré dans ma bouche, lui et son voisin de droite me regardaient ... ils attendaient ma première réaction, celle que j'ai toujours plaisir à retenir un peu comme pour faire durer le plaisir tant pour moi de les voir attendre que pour moi d'en savourer tout le nectar.

"Hummm ... oui c'est bon" me souviens-je avoir dit ce qui fit apparaître chez mes coreligionnaires un sourire béat tandis que je m'en remettais une fournée dans la bouche. C'est vrai que c'était bon et chaud en effet. Un peu pâteux à la fin et quasi gluant parce qu'il avait été bien préparé. C'est ça tout le secret de préparation d'une telle entreprise et je ne pus m'empêcher de demander comment cette préparation devait se dérouler. "On fait chauffer et on laisse quelques minutes que tout monte en pression afin que l'alliage se fasse" m'indiqua-t-on. C'était donc cela, être pressé ne servait à rien et il fallait laisser du temps au temps. C'est probablement pour cela qu'on le dit "magique" ... mais j'y songe, ta curiosité mal placée exigera probablement une photo. Ça tombe bien, j'ai eu le temps de procéder à l'exercice ...

Il fallait que LoupFoc vienne me visiter à Paris pour que je mange pour la première fois un bambou magique, moi qui en parle et t'en montre depuis plus de dix années maintenant ...

Tto, master of Magic Bamboo