Il est PrésidentLa fonction mérite d'être habitée par celui qui rencontre le peuple dit-on traditionnellement et c'est la mythologie de la Vème République que de penser que cette rencontre est programmée à chaque élection présidentielle. Une chose est claire : la semaine passée aura permis définitivement à François Hollande d'habiter la fonction.

Certains se désoleront qu'il en aura fallu du temps, d'autres que ce n'est qu'une éclipse qui ne masquera pas longtemps le reste et l'état calamiteux du pays ... qu'importe, le constat est clair.

Il faut dire que la semaine a été costaude pour le chef de l'Etat qui avait cru nécessaire de l'entamer lundi matin dernier par une interview fleuve à la radio, sur France-Inter et dès mercredi, l'emballement a été tel qu'il faut bien admettre qu'il n'a pas chômé le locataire de l'Elysée. Tu me diras, ce n'est pas vraiment ce que l'on attend de lui, qu'il chôme.

Sauf que ... le torrent de boue qui s'accompagne de chacun de ses moindres faits et gestes depuis le mois de mai 2012 a cessé et à juste raison au cours des derniers tant la stature présidentielle a habité François Hollande, que l'on raille si souvent pour sa gaucherie [!!!]. Et je me félicite qu'il ait invalidé son épithète de normalité affichée au début de son mandat dans de telles circonstances ...

Ce n'est pas que j'ai envie de lui rendre hommage pour le plaisir de lui rendre hommage, tant je trouve aussi que le comportement de nombre d'hommes politiques et de responsables a été à la hauteur de la situation. Mais voilà, je suis content que les français aient élu un homme qui a pesé pour maintenir un semblant d'équilibre au moment où la houle se faisait vigoureuse, au moment où les pièges de la division menaçaient. La France est un pays qui s'embrase si souvent contre lui-même qu'il y avait priorité à éteindre les braises chauffées par des communautarismes exacerbés par l'émotion et la peur.

De cela, il faut rendre hommage au Président de la République. D'autres auraient fait de même probablement mais je n'ai trouvé dans son attitude aucun signe d'affolement, juste de la gravité et surtout une propension à placer le curseur pile à l'endroit où je pense qu'il fallait le positionner. On lui a reproché d'avoir reçu tous les partis, c'était indispensable de le faire malgré les clivages et le mauvais-esprit stérile du Front National. On a été surpris de le voir débouler aussi vite sur les lieux de la fusillade à Charlie Hebdo, c'était là aussi nécessaire. On a presque été décontenancé de le voir à la télévision mercredi soir aussi combatif et vigoureux, c'était utile. Et hier, les images d'un François Hollande se comportant comme une synthèse de la concorde nationale resteront.

Aux "Je suis Charlie" qui pleuvent comme autant de témoignages d'affection et d'exorcisation de peurs, François Hollande m'a semblé indiciblement répondre "Je suis Président", non pour lui-même mais pour dire que l'Etat était là, que quatre millions de français dans la rue se sont exprimés dans un cadre d'ordre respecté et de sursaut. Oui, le message d'une faiblesse de l'Etat ne pouvait être envoyé, François Hollande a été au rendez-vous de l'Histoire, au moment où le peuple de France avait besoin de se retrouver. Il demeure toujours une approche assez paternaliste [qui confine parfois au monarchisme républicain] dans ce pays qui a tué le père en 1793 ...

Je ne sais pas comment cela évoluera à l'avenir, mais François Hollande a été à la hauteur des enjeux. Je me félicite qu'il en ait été ainsi, et que cela ait été lui.

Tto, rassuré