Naguère, les soirées de l'ambassadeur étaient réputées et tu sais pertinement pourquoi ... à cause des Ferrero Rochers ! A l'instar de l'Oncle Ben's, c'était toujours un succès. Tu connais mon goût immodéré pour les nouvelles expériences ... il y a plus d'une dizaine de jours, avec Zolimari, nous avons fait la rencontre [oui, il serait exagéré de parler de connaissance] du connard presque parfait à l'occasion d'un dîner qui, sans le connard sus-désigné, était presque parfait.

Tout se présentait magnifiquement bien, nous étions à l'heure [même en avance, ce qui n'arrive jamais], mon Zolimari avait réussi quelques heures auparavant à s'acheter un nouveau manteau gris de working boy, un costume qui lui fait des fesses magnifiques et des chaussures de working boy. Autant dire que nous étions comme le séant fraichement lubrifié d'un jeune gay prêt à être dépucelé, nous étions en position et en conditions.

"Euh j'vous préviens ... Y aura un mec ce soir, il est un peu spécial" .... T'inquiète cocotte me dis-je en mon fort intérieur, avec ce que je vis tous les jours [pour rappel, la World Company en ce moment, c'est la Bosnie, Tchernobyl, le Vietnam, Fukushima avec un zeste de Lybie ... donc très reposant], rien ne peut m'arriver ce soir. Funeste erreur ...

Notre hôte avait convié sa meilleure amie [et néanmoins collègue ... si si, c'est possible ... ne me demande pas comment, pour moi cela reste abscons ce concept amitié/boulot] avec son copain et le meilleur ami dudit copain. Tu as bien compté, nous étions 6 [comment tu m'impressionnes mortellement de la mort qui tue !!!]. Et dès l'arrivée du copain du copain de la copine de notre copine [tu suis toujours ?], j'ai compris que nous avions affaire à un vrai champion.

Comment te dire ... Je ne suis pas méchant par nature, je m'accorde un peu de cruauté [le plus souvent bienveillante] mais là ... Bon déjà, le mec a un prénom de lessive. Ok, ça ne te choque pas mais quand même ... Je n'attaque pas sur le physique encore qu'il y aurait matière [dans tous les sens du terme si tu vois ce que je veux dire]. Les salutations sont expédiées rapidement et d'emblée, j'observe qu'il ne nous regarde pas dans les yeux. Bigre ... un homophobe qui croise deux tapettes et qui redouterait que cela fut contagieux ? Non, il se vérifiera au cours de la soirée qu'en réalité le sujet présente un déficit de confiance en lui qui n'a d'égal que celui de la France en matière de commerce extérieur.

La soirée commence doucement ... on discute de choses et d'autres, sans beaucoup d'importance ... J'apprends à l'assistance médusée que j'ai appris à des poissons panés à nager, que je sais dessiner "fondamental" au Pictionnary, que Zolimari a failli acheter un pull en laine de poule tout à l'heure, que j'ai décidé d'arrêter d'utiliser le RedBull comme somnifère, que je sais aussi lire le braille sans les mains etqu'à la World Company je n'arrête pas de promettre à tout plein de monde que je peux leur faire passer un sale quart d'heure en moins de dix minutes. Des banalités quoi ... et puis, je ne sais pas pourquoi ni comment, d'un seul coup, on en vient à parler de sites de rencontres. Et là, telle la Mer Morte s'ouvrant devant Moïse, cela a été extraordinaire [au sens propre ... qui sort de l'ordinaire].

"Nan mais attends tu sais ... les sites de rencontres, moi je peux en parler parce que j'y suis allé, qu'est ce que tu crois hein, et comme je le vis mieux, je peux t'en parler des sites de rencontres hein. Parce que bon, c'est quand même terrible les sites de rencontres ... Tu te rends compte qu'on juge les gens sur une photo, non mais une photo ! C'est presque du fascisme ça. Moi je vais pas y aller par quatre chemins : faut être désespéré pour aller sur des sites de rencontres et j'en ai fait, quand j'allais bien. Mais quand j'y étais c'est vraiment que j'allais mal. Finalement, je me dis que je préfère lâcher quelques billets pour ne pas être jugé sur une photo. Tu te rends compte qu'il y en a qui balancent des photos d'eux dénudés ! C'est écoeurant, voila ce que je pense. C'est à l'image de notre société : on te jette comme un kleenex, sur une photo. Et ... je sais de quoi je parle ..."

J'ai bien tenté de l'interrompre quelques fois pour lui signaler qu'il n'avait pas forcément le monopole de telles fréquentations et que, nonobstant ce qu'il pouvait bien en penser, je ne partageais pas son indignation au sujet du fait que l'on soit jugé sur une photo, que cela soit si grave, qu'il soit si décadent de proposer des photos dénudées [t'imagine l'AVC qu'il risque s'il apprend que des mecs balancent leur bambou plein de raideur comme autant de bristols pour venir leur permettre de s'envoyer en l'air], que le kleenex en question pouvait servir à autre chose et que manifestement, son problème ne se situe pas vraiment au niveau du moyen en lequel consiste le site de rencontres mais plus au niveau de son image personnelle. Il y aurait eu beaucoup à dire aussi sur le mépris témoignant de sa préférence consistant à recourir aux amours tarifés. Sauf que ... à chaque fois que j'ai tenté de lui apporter un peu de contradiction, il s'est énervé, s'est emballé [ce qui doit le changer de Meetic], m'a contredit même quand je disais la même chose que lui [rien que pour le tester] ... Bref, je lui ai laissé ses certitudes de quadra amer et mal baisé engoncé dans ses certitudes navrantes et misérables.

Le sujet ayant été évacué, nous avons dérivé vers le cinéma et là, j'ai eu droit à un Télérama vivant devant moi, accumulant les références vaguement Café de Flore qui sont, d'ordinaire, susceptibles d'impressionner son interlocuteur. Pas de pot, j'ai un peu de culture et surtout quelques références ... On passe encuite à une fabuleuse question de l'acrimonie des français métropolitains pour les français des DOM-TOM, un petit cours sur le colonialisme [parce qu'attention, il sait de quoi il parle hein mais il pose des questions au sujet desquelles il n'a pas de réponse puisqu'il m'ordonnerait presque de l'éclairer] ... Là encore, same player shoot again puisque j'étais venu avec mon cerveau irrigué ce soir là ...

Ensuite de cela, j'ai marqué une petite pause, j'ai choisi de faire ostensiblement un câlin à mon chéri devant lui tandis que ses acolytes assez gênés par son attitude avaient choisi d'aller griller une cigarette. Et puis ... ce fut la suite, que dis-je l'apothéose ! Bah oui, une fois qu'on a parlé d'amourettes, de société et de cinéma ... soit on parle de politique et là on se fouttait sur la gueule ou alors on parle boulot et là ... on a failli se foutre sur la gueule hi hi hi. En effet, le quadra resplendissant que nous avions devant nous y est encore allé de sa lourdeur et de son hallucinant mépris. Une boite qui vire une femme enceinte ? Bah d'un autre côté, la vie c'est la jungle tu comprends. On délocalise sans respecter les règles ? De toute façon, il n'existe pas d'autre pouvoir que celui de l'argent. Le monde du travail se résume à l'opposition frontale des losers et des winners [dont il est forcément, puisqu'il était à New-York 4 jours avant entrain de fumer un joint sur la cinquième avenue et qu'il sera à Oslo trois jours plus tard]. Ok ... là aussi, Houston on a un [gros] problème.

Cela faisait longtemps que je n'avais pas croisé un cas social pareil ... En fin de soirée, Zolimari a réussi à lui faire admettre, en le coinçant sur le fait que l'on est forcément plus insouciant à 20 ans qu'à 40, qu'il n'était pas cohérent et qu'il y avait davantage à gagner à écouter les uns et les autres plutôt qu'aligner les idées toutes faites comme un chapelet. Avec son sourire carnassier, il te l'a embobiné et ni vu ni connu j't'embrouille ... En suite de quoi, nous avons préféré ne pas nous imposer la présence du connard presque parfait plus longtemps .... il est des plaisirs qu'il faut savoir consommer avec modération. Il n'est de si bonne compagnie qui ne se quitte.

En rentrant, dans la voiture, on a beaucoup rigolé et on s'est félicité chacun de notre prestation respective.

Pour la cuisine, 9/10
Pour la déco, 9/10 aussi
Pour l'ambiance et l'activité, 10/10 !!! Franchement, inviter le connard presque parfait ... j'aurais jamais osé ...

Tto, même pas méchant mais j'attends le prochain avec délectation