Hier après-midi, ton Tto a vécu un moment particulier ...

Au détour d'une phrase, Môman dit :
"Tu sais ... va vraiment falloir que tu le ranges ton placard avec toutes tes fringues. Tu avais promis de le faire l'année dernière. Mais là, je ne vais pas te lâcher !"

Le temps de débarasser la table [car je suis un garçon bien élevé] et tandis que ma mère commençait sa vaisselle, j'ai décidé de tester sa détermination en lui disant de façon anodine :
"C'est quoi que tu veux que je débarasse ?"

Ni une, ni deux ... elle cesse d'emblée de plonger ses mains dans l'eau savonneuse et mousseuse, éclaire son visage d'un sourire presque incrédule, ses yeux testent ... et elle me dit "Tu veux le faire maintenant ?". A ma réponse affirmative faussement motivée, elle s'essuie rapidement les mains, retrouve son entrain [oui, d'un coup, elle a moins mal partout] et hop, nous voila à l'étage dans mon ancienne chambre où nombre de mes affaires hantent encore la pièce témoignant ainsi de mon passage [... oui, je passe rarement inaperçu, j'y mets un soin particulier]. Et là ... c'est parti.

En une heure, on a vidé les trois quarts de ma penderie.

Certaines affaires iront directement à la poubelle :
- ce t-shirt blanc sur lequel en rouge est inscrit "Dites oui !"
- ces chemises d'un autre temps, celui d'un adolescent qui cherchait un peu son style qui sont trop usées pour être données mais que je gardais car elles étaient chargées de souvenirs
- ces caleçons [qui en ont vécu des choses] dont les élastiques sont tellement usés qu'ils ont cramé

D'autres vêtements iront grossir les rangs du stock que ma Môman vendra en septembre au cours de sa dernière brocante me dit-elle ... ce qui me fera des sous. Des jeans, des chemises, des cravates, des t-shirts ... En toute honnêteté, il y a clairement de quoi vêtir quelqu'un convenablement pendant une bonne grosse année !

Au gré des habits passant, je me suis souvenu de telle ou telle histoire qui leur est propre, de celui/celle qui me les avait offert, de la raison qui a présidé à leur acquisition, de ce qui m'est arrivé quand je les portais, des photos sur lesquelles je suis lorsque je les porte ... bref, ce fut l'usine à souvenirs. Les "Ah ... tu te souviens de ça ?", "Oh oui, je l'ai repassé celui-là" et les silences de réflexion se sont donc succédés ...

Pourquoi suis-je, cette fois, parvenu à me défaire de tout ce à quoi je me raccroche depuis des années, empilant des vêtements les uns sur les autres [jusqu'au déraisonnable] ? Je ne sais pas ... Je sais juste que cela ne me fait plus peur, je me dis juste que j'ai beaucoup de chance d'avoir, à la faveur de ce destockage sauvage et cruel pour mes certitudes passées, trouvé un nouveau moment de complicité extrême avec Môman qui a fait preuve de diplomatie et de tact avec son fiston qu'elle connait si bien.

J'ai retrouvé des pulls que je n'ai jamais mis, des chemises dont je me demande bien pourquoi je ne les mets pas/plus ... J'aime beaucoup les fringues, toujours et encore. Mais le trophée d'avoir une penderie qui explose ne m'intéresse finalement plus beaucoup.  Hier après-midi, je te le dis : j'ai trouvé que j'avais changé.

Tto, qui a [de loin] toujours de quoi s'habiller pour plaire